lundi 26 octobre 2020

"Père. Le roman du", de Jacques Morin

 


Étrange recueil, que « Père. Le roman du », de Jacques Morin, publié par les Éditions Henry.

D’abord intitulé « Roman », alors qu’il s’agit de poésie, du moins dès la deuxième partie du livre, qui en compte cinq.
Ensuite, par son drôle de titre pas drôle, car tronqué.
Au début, pourtant, c’est très clair. À travers des fragments en proses, l’auteur parle de son père, ou plutôt, il évoque des bribes de souvenirs qu’il a de lui, du peu de rapports qu’il a entretenus avec lui, du fait aussi, de sa disparition sans doute prématurée.
Puis le projet de parler du père a l’air de tourner court, et laisse place à des poèmes aux vers courts, rasés de près, comme surveillés de près, dans lesquels Jacques Morin est devenu lui-même père, puis grand-père.
Mais au fil des parties de ce livre, qui succèdent à l’initiale, la paternité de l’auteur semble escamotée à coups de pudeur et d’abstraction, à l’inverse du projet de tout dire des premières pages. Le lecteur ne saura pas finalement, ce que c’est que d’être père, dans ce livre ! Il reste sur sa faim, en retard sur un nouveau dessein.
Quelque chose veut s’exprimer qui ne fait qu’affleurer à la surface. Même chose quand il s’agit de sexualité et d’amour.
Enfin, si je puis dire, arrive, après toutes ces années, le spectre du vieillissement, forcément malvenu. Et là, de nouveau, les choses redeviennent plus claires. Cependant, est réaffirmée la fidélité à soi et à celle et ceux que l’on aime.

Extrait de « Père. Le roman du », de Jacques Morin :

« pour toi j’ai une immense compassion
sans borne sans limite

si tu souffres je souffres
la douleur n’est pas située
elle reste entière
c’est toujours la question fondamentale
le couple ou la solitude

l’impression d’être à moitié
incomplet

et la fragilité de l’amour
tout au bord du divorce des cœurs
de la séparation des corps »

La vignette de couverture est d’Isabelle Clément.

Si vous souhaitez vous procurer « Père. Le roman du », de Jacques Morin, qui est vendu au prix de 8 €, rendez-vous sur le site de l’éditeur : https://www.editionshenry.com/index.php?id_article=559

dimanche 18 octobre 2020

"Banana split", de Christine de Rosay

 


Publié par les Éditions Le Contentieux, "Banana split", de Christine de Rosay porte bien son sous-titre de "dizains érotiques".

Et comme le dit sobrement Jean-Marc Thévenin dans l'introduction, le titre de "Banana split" est facile à expliquer : "La banane évoque le pénis, la glace les couilles, et la chantilly comme l'excitation de l'ensemble".  Au moins, les choses sont claires !

Dans ce recueil, les dizains, qui viennent après une pratique assidue  des sonnets, sont donc des poèmes d'union sexuelle. Mais à travers ces poèmes, pointe l'ambiguïté ou la confusion des sexes. D'ailleurs, même le prénom de l'autre, Dominique, tient de la femme et de l'homme.

En tout cas, le bonheur n'est pas ambigu dans ces poèmes.

La photographie de couverture est de Vincent Traoré.

"La faiblesse saumon des cartilages
J'entre dans ton sommeil whisky hors d'âge
Vulve serrure en nos trousseaux de clefs
Te léchant par amour le mont pelé
Des petits pieds coulissent baskets jaunes
Les souvenirs tout au bout est le Rhône
Dorment en rond les chattes par ennuis
Sur ta culotte est ma langue sans bruit
Plane alchimie les secrets de jeunesse
Domi tu dors tes seins que je caresse."

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Banana split", de Christine de Rosay, qui est vendu au prix de 6 €, rendez-vous sur le site de son éditeur : https://lecontentieux.blogspot.com/

"J'ai commencé à dessiner des anges", de Catherine Andrieu

 

Publié par les Éditions Rafaël de Surtis (qui ont déjà édité précédemment plusieurs livres de Catherine Andrieu), dans sa collection "Pour un Ciel désert", "J'ai commencé à dessiner des anges" est un recueil de textes en prose d'une page, qui font face à des dessins joliment colorés (sur la page de gauche) de l'auteur (dont celui de la première de couverture).

Qui est l'ange ? C'est la femme bien sûr, accompagnée de son ange gardien (ou de son prince charmant en attente de métamorphose ?) : le chat.

Ici, les proses arrivent après les images. En tout cas, elles les commentent. La caractéristique de ces textes, c'est qu'ils font montre d'une sensibilité peu ordinaire, racontant sans fard l'histoire entre une femme et son chat. Histoire d'amour ? Pas seulement. Histoire de mort aussi.

Dans "J'ai commencé à dessiner des anges", enfance (naïveté) et adolescence (écorchure) sont liés dans l'âge adulte. Et il en faut, du courage, pour aller aussi loin dans l'expression de la lucidité. 

La préface est de Jacqueline Andrieu, la sœur de l'auteur.

Extrait d'un des textes de "J'ai commencé à dessiner des anges", de Catherine Andrieu :

"Sur le dessin la femme n'est pas belle. On dirait qu'elle n'a pas de mains. Peut-être l'enfant n'a-t-elle pas réussi à lui dessiner les mains...On dit que pour juger de la qualité d'un peintre, il faut regarder ses visages peints et ses mains. J'ai tout faux ! À moins que la femme ne saigne à gros bouillons… Le chat est trop gros aussi, il est à peine esquissé… Il n'y a rien de plus jouissif que de dessiner la silhouette d'un chat, même si ma sœur trouve que mes chats ressemblent parfois à des lapins. Là où tu vas, mon vieux chat, je te suivrai. Toutes mes amours sont mortes, je suis dans le vide. Je n'ai que toi au monde… Dis-moi si tu meurs ou si tu meurs pas. Faudrait savoir des fois !... Je veux ton corps dans la poussière d'étoiles. (…)"

Si vous souhaitez vous procurer "J'ai commencé à dessiner des anges", de Catherine Andrieu, qui est vendu aux prix de 17 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.rafaeldesurtis.fr/index.html

Ou sinon, le site de l'auteur : https://www.catherineandrieu.fr/j-ai-commenc%C3%A9-%C3%A0-dessiner-des-anges/

jeudi 8 octobre 2020

"Étreintes mystérieuses", de Philippe Mathy

 

Publié par les Éditions "L'Ail des ours", dans sa collection "Grand ours", "Étreintes mystérieuses", de Philippe Mathy, est un recueil de proses poétiques.

Ce livre m'a plu pour ce qu'il ne montre pas en premier lieu.

En effet, il est ici question, pour résumer, des variations de la lumière dans la nature, selon les saisons. Un thème très classique, dans le domaine de la poésie.

Cependant, j'ai été étonné par la solitude qui se dégage de la description de ces paysages autant intérieurs qu'extérieurs.

L'auteur semble chercher à ne pas du tout exister à travers ce qu'il voit, et c'est très réussi, de ce point de vue. Si la nature est idéalisée, elle n'est pas pour autant rendue forcément attachante.

À cet égard, le deuxième texte qui compose ce court volume, est intitulé "Au bord de l'encre", constitue comme une explication de ces "Étreintes mystérieuses", qui montrent le rapport de leur auteur aux choses, avec une citation de Lao-Tseu : "celui qui sait ne parle pas, celui qui parle ne sait pas".

Extrait de "Étreintes mystérieuses" :

"En vain le vent d'été court sur les chemins, froisse l'herbe, les robes des fleurs accrochées aux talus. En vain le vent d'été cherche à reprendre son souffle près du vieux mur du cimetière que la chaleur n'atteint jamais. Il faudrait pourtant qu'il emporte avec lui les rêves et les prières des vivants. Elles pèsent sur les morts comme nénuphars sur un étang."

Les illustrations (dont celle de couverture) sont de Sabine Lavaux-Michaëlis.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Étreintes mystérieuses", de Philippe Mathy, qui est vendu au prix de 6 € (+ 2 € de frais de port), rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://www.editions-aildesours.com

samedi 3 octobre 2020

"Sous la ramée des mots", de Georges Cathalo

 


Publié par les Éditions Henry, "Sous la ramée des mots", de Georges Cathalo est un recueil de courts poèmes dédicacés à des amis, souvent collègues de poésie, quelques-uns étant hélas décédés.

Dans ce livre, je retrouve les caractéristiques du style de son auteur : si les vers sont libres, ce sont de vrais vers, bien découpés (pas des phrases découpées en vers) et le résultat est une série de textes clairs, qui se lisent bien, sans prise de tête.

Ainsi, ces poèmes, tout en appelant par leurs indignations à un changement de monde incertain, occupent en même temps toute la largeur du réel.

Extrait de "Sous la ramée des mots", de Georges Cathalo :

"Soirs 

                                                                                                                    à Christian Rouquayrol
de certains soirs
où tout est si paisible

on ne retient
que la rougeur du couchant
le parfum des lilas
et la clémence du destin
si l'on peut dire

le destin le hasard
ou tout autre chose
qui ne nous ménage guère
mais nous épargne parfois
à parts égales."

La vignette de couverture est d'Isabelle Clément.

Si vous souhaitez vous procurer "Sous la ramée des mots", de Georges Cathalo, qui est vendu au prix de 8 €, rendez-vous sur le site de son éditeur : https://www.editionshenry.com/index.php?id_article=557

vendredi 2 octobre 2020

"Quand je serai jeune", de Daniel Birnbaum

 


Publié par les Éditions p.i.sage int.érieur, collection sous-titrée malicieusement "3,14 g de poésie", "Quand je serai jeune", de Daniel Birnbaum évoque des souvenirs d'enfance avec mélancolie. Car bien sûr, le temps a beaucoup passé.

Malgré tout, il faut reconnaître que l'on n'est jamais aussi jeune que quand on vieillit pour parler bien de ces choses-là (logique, en fin de compte). C'est la signification principale que je retire de ces poèmes, tant il est vrai que l'enfance constitue à elle seule un réservoir de poésie inépuisable.

Les poèmes sont en vers libres, en police de caractères normale, et comportent un titre, ou bien sont en italique et sont dépourvus de titres. Ainsi, si les premiers types de textes me semblent faire référence à des souvenirs assez précis, les deuxièmes paraissent davantage comme des commentaires détachés de toute anecdote.

J'avoue ma légère préférence de lecteur pour les poèmes avec titres, qui comportent nombre de trouvailles, que je qualifierai de poétiques de situation.

Par exemple, dans "Défilé" :

"Enfant ce que j'aimais
dans les fanfares
c'était la grande caisse
cette espèce d'énorme tambour vertical
posé sur une bedaine plus ou moins proéminente
qu'on bat avec insistance
tout en marchant sans voir ses pieds

la grosse caisse qui résonne
dans une rue enfiévrée
faisant vibrer des tympans bienveillants
et qui résonne encore
jusqu'à ce qu'il n'y ait plus personne
pour vous montrer où mettre les pieds."

La photographie de la couverture est de Sophie Desseigne.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Quand je serai jeune", de Daniel Birnbaum, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.p-i-sageinterieur.fr/