mardi 16 février 2016

"Ce peu de soi", de Michel Bourçon



"Ce peu de soi", édité par les éditions "La tête à l'envers", regroupe quatre cycles de poèmes en prose, au nombre de deux par page, successivement intitulés : "Chasser du silence cette voix", "Ce peu de soi", "Pauvre légende" et "Cette avide attente", écrits entre 2011 et 2013.
Je n'insisterai pas sur le style de ces proses, faites d'équilibre et de sobriété, alliance de classique et de moderne. Bref, du métier sans affectation.
Bien qu'étant traversées par un fil conducteur différent (la voix, les mots, le corps, l'attente), ces quatre parties forment un tout, tant elles sont animées par des préoccupations voisines, voire récurrentes dans les derniers textes publiés par Michel Bourçon.
En effet, dans les textes formant "Ce peu de soi", c'est l'insatisfaction qui domine, le fait que, comme le dit Rimbaud, "la vie est ailleurs".
Parfois, c'est cette voix obsédante qui nous dérange, tantôt c'est la pesanteur du corps qui empêche de vivre autrement. Et bien sûr, les mots frappent par leur impuissance.
Devant les yeux de l'auteur, existe toujours cette absence, sorte de no man's land qui figure la séparation d'avec cette vie idéale, dans laquelle il ne serait plus besoin de penser :
"Nous avons les yeux grands ouverts sur ce qui nous laisse sans repos, que nous ne perdons jamais de vue, les yeux qui s'agrandissent d'incompréhension, fourragent dans cette absence de visage".
Dans ces proses, lorsque le corps divorce d'avec l'esprit, le lecteur ne peut s'empêcher de penser qu'il y aurait comme un appel à la foi religieuse, une soif de transcendance.
Mais Michel Bourçon nous détrompe vite à ce sujet :
"Nous nous consacrons à l'attente, déclarons que jusqu'ici tout a eu lieu dans une autre vie que celle qui est la nôtre désormais, sans voir que nous sommes toujours dans cette pauvre légende, dont nous ne pouvons guère nous écarter. Ce qui nous tient est cette volonté de ne pas vouloir s'y enliser. Nous restons debout, sans trouver d'issue, le moindre regard peut être un appel à l'aide, auquel seule la clarté du jour répond".
Donc, il n'y a point de salut, mais un éternel recommencement de ces tentatives visant à s'échapper de soi.
Hélas. Car nous voudrions parfois la saisir, cette absence, afin qu'elle ne nous échappe plus, enfin...
Il est à noter que cette quête, par l'emploi du pronom personnel "nous", concerne la condition humaine en général, plutôt qu'un être en particulier. C'est effectivement le lot commun à tout roseau, lorsqu'il est pensant !
Je précise que l'illustration de couverture est un fragment de peinture de Renaud Allirand.

Pour plus d'informations sur "Ce peu de soi", de Michel Bourçon, vendu au prix de 16 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.editions-latetalenvers.com/

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire