Drôle de vie que
celui-là. Drôle dans tous les sens du terme. Drôle comme original et comme
marrant (et en même temps pas marrant).
C'est l'histoire d'un
mec perdu dans les méandres d'une ville trop immense pour lui. Car elle est
partout, cette présence féminine (car la ville est féminine). Elle c'est aussi
une femme, elle c'est encore une senteur, ou bien une fleur, quelque chose qui
donne envie de bouger, même si ce n'est que les yeux.
Car bien entendu, dans
une ville, il y a aussi les méchants anonymes. Ceux qui hantent les pavés.
Nous-mêmes, quand nous voyons la misère allongée sans bouger le petit doigt, ou
quand nous nous subordonnons à la machine bien huilée de l'emploi salarié.
Heureusement que cette
soif de liberté redonne des couleurs à ce qui n'en a pas d'ordinaire. Et
l'auteur s'amuse avec les choses de la vie, en leur donnant des dimensions
minuscules par la parole.
C'est que Jan Bardeau
écrit sous les contraintes. Celles-ci sont de plusieurs sortes : ne jamais
utiliser les auxiliaires être ou avoir, ne jamais utiliser dans deux textes
différents les mêmes verbes et substantifs.
Ceci étant dit, ces
contraintes n'entament pas la volubilité de l'auteur. Sauf peut-être, que plus
on avance dans le recueil, plus les textes deviennent étranges. Et la
contrainte apparente (qui n'en est pas une), c'est de constater l'existence de
nombreux jeux de mots basés sur des assonances. Et à la fin, le lecteur
découvre le babil du nouveau-né, avec le vocabulaire en plus :
"Ouf, le ruisseau
t'embaume baba, baba bois, bois baba, les douleurs s'estompent, leurs morsures
guettent toutefois, baba là-bas t'extirpe de toi, baba, sous le bât, oh baba,
l'onde féconde délate la graisse de l'usine, baba, et ton ancienne faconde
exploserait presque le béton de ta parole d'ouvrier, baba, le bois ramage et
grignote et gigote, baba, ouf, sous l'ombrage des frondaisons, baba, ils ne te
rabattront pas, ne te choureront pas ton choix;
baba ne balbutie pas,
il souhaite adieu;
plus de baba".
Bref, une véritable
expérience d'écriture qui se caractérise par sa richesse créative.
Alors, me direz-vous :
qu'en est-il du "Et compagnie" ? Dans ce recueil qui fait partie de
cette collection pilotée par Walter Ruhlmann, la compagnie c'est celle des
illustrations de Sébastien Russo, de l'expressionnisme en BD, que j'aime
beaucoup. Quant à la couverture, elle est superbe et est traversée par l'homme
qui ne riait jamais (mais qui nous fait rire) : Buster Keaton.
Pour vous procurer
"Jan Bardeau et compagnie", vendu au prix de 5 € (+ frais de port),
vous pouvez aller faire un tour sur le blog de l'éditeur (Walter Ruhlmann de
mgv2>publishing) : http://mgv2publishing.blogspot.fr/
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