La
poésie de Line Szöllösi est délibérément lyrique, autant vous prévenir tout de
suite. A mes yeux, c'est une qualité.
Détail
amusant : dans ce recueil intitulé "Un grisé cependant", et que
publie Jean-Pierre Lesieur en complément à sa revue "Comme en
poésie", les poèmes (tous en vers libres) raccourcissent au fur et à
mesure que l'on avance dans la lecture du livre.
Le
premier texte - "L'H" c'est celui de l'hortensia - se prolonge sur
plusieurs pages. Quant aux autres textes, ils font une page, et à la fin, il y
a deux poèmes par page.
Ici,
plus qu'ailleurs, la multiplicité des images visuelles vient de la multiplicité
des mots employés. De ce point de vue, le titre du dernier poème de "Un
grisé cependant" éclaire le reste du recueil, puisqu'il s'intitule
"Éloge du vocabulaire".
La
démonstration se vérifie particulièrement dans "L'h", dans lequel le
mot hortensia appelle un monde entier. Il y a de la virtuosité là-dedans. Et
aussi de la fantaisie, si ce n'est de l'humour.
A lire
ces textes, je me dis que Line Szöllösi cache sa sensibilité derrière ses
pirouettes, et son ironie, épaulée par un sens aigu de l'observation, n'est pas
pour me déplaire. Car j'aime bien que le poème, reflet de nos états d'âme
changeants, reflète également la diversité du monde.
Voici un
poème extrait de "Un grisé cependant" :
"Le centre administratif
A
découper suivant les pointillés
pour une
remise en cause, je vins à ce chef-lieu
passée
la forêt aux terres brûlées
découper
le
cavalier seul, le pipe-line sur le bord du fleuve
les
singes en liberté
et je
fus taverne Flamingo
jouer au
consul, vieux rêve de mescal
découper
la seconde partie du jour
devant
moi soudain le donia sur son alezan
et les
bottes de cuir de l'homme qui l'escortait,
découper
une sorte de balançoire mentale,
action
répétitive, salutaire pour oublier
puis
prendre un numéro de 1 à 100
à
l'entrée, après le sas en plastique
découper
la tête de l'employé
à
moustache en forme de soutache
et le
dossier bien mérité en main
découper
la sous-préfecture
le bus
du retour, méthodiquement
y
compris les voyageurs
suivant
fidèlement les pointillés
afin de
supprimer les formulaires
et ce
que trafiquent les registres
à l'abri
de leurs grands ciels nuageux."
Pour
commander "Un grisé cependant", de Line Szöllösi", vendu au prix
de 6 €, rendez-vous sur le blog de la revue "Comme en poésie",
http://comme.en.poesie.over-blog-com/
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