Dans "Et bien sûr j'ai pas de parapluie", de Salvatore Sanfilippo, deuxième recueil de l'auteur publié par les Éditions Gros Textes, je reconnais plusieurs poèmes. C'est normal : ils ont été publiés dans "Traction-brabant" auparavant.
Salvatore est un habitué de longue date du poézine.
Et à chaque fois, c'est pareil : le lecteur se laisse emporter facilement par ses poèmes, en apparence, sans prétention, si ce n'est (c'est déjà pas mal) celle de nous faire rire.
Dans ce recueil, il est question de poésie (bien sûr), d'amour (bien sûr) et même de lancer de marteau, dans la série des poèmes sur le sport (un peu de sport, mais pas trop quand même) publiés en fin de volume.
Alors, du coup, le lecteur est tout surpris de découvrir, au détour des pages, un poème soudain sérieux et qui épuise son sujet (c'est le cas de le dire), comme celui-ci :
"ADIEU PATRON
Adieu patron
À partir de demain
Je viens plus bosser
Je veux plus faire ce boulot
Qui me rend barjot
Je veux plus être exploité
Plus être traité
Comme un pantin
Un moins que rien
Je veux plus t'enrichir
Toi et tes actionnaires
Qui gagnez du fric sur mon dos
Pendant que je me tue au turbin
J'ai accumulé un petit pécule
Avec le peu d'argent
Que tu as consenti à me donner
C'est suffisant
Pour bouffer une salade
Et un plat de pâtes
J'ai envie de profiter du soleil
Et des moineaux
Qui viennent chanter
Sur le bord de ma fenêtre
J'ai envie
De voir grandir mes p'tiots
Adieu patron
Je me lèverai plus
À trois heures du mat
Pour venir bosser
Dans ton usine mal chauffée
Je veux plus bouffer
De la poussière
Et des produits toxiques
Qui me bousillent les poumons
Je veux plus entendre
Le bruit assourdissant des machines
Qui m'ont rendu sourdingue
Je veux du calme et du silence
Pour chasser le bourdon
Qui me trotte dans la caboche
Adieu patron
Je veux plus de ton usine
C'est une vraie prison
Ma vie est précieuse
Autant que la tienne
Une petite voix
Me dit que la vie
C'est autre chose
Que de passer ses journées
À marner comme une brute
De se tuer à la tâche
Et de finir
Usé
Cassé
Épuisé"
Je souligne également l'existence d'un autre poème qui s'appelle "La femme de ma vie" (trop long pour être reproduit ici), qui m'a intéressé pour sa construction, la richesse de son scénario ...
Les illustrations de Chrisal (dont celle de la couverture) sont nombreuses (une dizaine pour 90 pages au total, pas si courant dans un recueil de poésie).
Si vous souhaitez en savoir plus sur "Et bien sûr j'ai pas de parapluie", de Salvatore Sanfilippo, qui est vendu au prix de 8 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://grostextes.fr/