Publié par les Éditions La Table Ronde, "Lundi propre", de Guillaume Decourt se présente comme une suite de 70 dizains rimés : une forme souvent pratiquée par l'auteur.
Cette description formelle sommaire ne saurait s'arrêter là, car il y a beaucoup de choses à dire sur ces poèmes.
Tout d'abord, ces dizains ont tous un titre (et un numéro), ce qui n'est pas si habituel dans la poésie d'aujourd'hui. En effet, cette dernière fait souvent l'économie des titres, surtout quand les poèmes sont aussi courts. Mon affirmation est, bien entendu, empreinte de dérision, et la démarche du poète semble avoir la même caractéristique.
Ensuite, ces dizains permettent de faire à la fois le tour de la terre, et presque le tour des personnages qui la peuplent. C'est dépaysant et exotique. Le "je" est employé la plupart du temps, ce qui donne à penser qu'il s'agit là d'instants de vie (on ne doute pas qu'il y a de la vie là-dedans), mais d'instants de vie réels.
Du coup, le plaisir du lecteur consiste à essayer de deviner "entre les vers" si toutes ces anecdotes sont vraies ou fausses. Ce jeu est perdu d'avance, autant l'avouer. Surtout quand on fait semblant de ne pas savoir que c'est faux ! Mais ce jeu de lecteur vous amène avec facilité au bout du livre.
Il y a également pas mal d'inflexions musicales dans ces poèmes. Peut-être la "faute" au piano qu'a beaucoup pratiqué Guillaume Decourt. On a vite fait de passer du mode majeur au mode mineur et vice-versa. Il ne suffit pas d'utiliser, pour cela, beaucoup de mots pour le dire, il suffit d'utiliser les bons, y compris quand ils semblent décalés - anglo-saxons, ou tout simplement - le vilain mot - étrangers.
Et puis, l'auteur a le sens des formules bien ajustées, qui vous flinguent au détour d'un vers. Formules qui ne sont pas que des formules, même si peut-être, elles ne sont pas que des vérités.
Bref, à l'arrivée, le lecteur ne sait pas si c'est du lard ou du cochon. La poésie de Guillaume Decourt oscille comme cela entre plusieurs petits états qui ne figurent pas forcément sur la carte du monde, mais qui peuvent emprunter la carte du cœur.
Car justement, la justesse des poèmes publiés ici dépend de cette recherche d'équilibre permanent, pour résumer, entre la tristesse et la joie.
Extrait de "Lundi propre", de Guillaume Decourt :
"56. NUITS
Monts du Forez ou bien Nouveau-Mexique
Je n'aurai pas assez vécu ma mère
Je n'aurai pas assez vécu mon père
Ils sont ici les Jumeaux Héroïques
Grecs français ou peut-être Navajos
Ils s'en prennent à mon sens de l'humour
J'invoque les possibles je songe au
Temps qui a passé j'appelle au secours
La tour Eiffel scintille chaque nuit
Je porte mes bottes de Tasmanie"
Si vous souhaitez vous procurer "Lundi propre", de Guillaume Decourt, qui est vendu au prix de 14 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://www.editionslatableronde.fr/
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