Publié par les Éditions Tarmac, "Nous les derniers vivants", de Chloé Charpentier, est un recueil de poésie qui étonne d'emblée par sa variété, à travers une centaine de pages bien remplies.
Formellement, tout d'abord, les poèmes en vers libres sont entrecoupés de séquences en prose ou de dialogues.
Ce recueil est surtout coiffé d'une préface qui donne le ton du livre, n'hésitant pas à faire part de convictions personnelles. On apprend à l'école et au travail à être le plus objectifs possible. Eh bien ici, on réapprend la subjectivité : expression d'émotions, d'un idéal (un gros mot aujourd'hui).
"Nous les derniers vivants" est surtout un hymne à Gaïa, la Terre, c'est à dire à la nature, mais également à la vie simple qui l'accompagne. Tout le contraire de ce qui pourvoie à la révolte en ces pages : société de consommation, appauvrissement de la nature, vies en villes elles-mêmes appauvries, individualisme et avant tout, absence totale d'imagination, enfin, pauvreté des laissées pour compte de la société.
Bref, le monde le plus ordinaire dans lequel nous vivons : apoétique, avec des acteurs qui sont plongés la tête dans le téléphone portable.
Dans ces poèmes en vers libres, là encore, Chloé Charpentier n'hésite pas à faire éclater sa rage, ce qui est assez rare dans le monde des lettres, d'ordinaire (trop) bien élevé (mais pas dans l'empathie).
À l'arrivée, le résultat est une belle poésie lyrique qui se lit comme elle respire : naturellement.
Extrait de "Nous les derniers vivants", de Chloé Charpentier :
"Les enfants ne meurent plus de la tuberculose
les mères ne meurent plus en couche
et les hommes ont perdu le goût des blessures
de guerre
Non tout cela est passé
pour nos cœurs plus justes
Les hospices de la Démocratie ont eu raison
des morts
Soyons fiers mes frères
ornons nos écus et nos insignes
ô puissance - puissance de notre civilisation -
prodigue en art et économe
tout compte pour nous
car nous savons compter
Pour un euro dans une cave clandestine
on coud des habits à Paris
on ramasse des fruits ou des cabosses en
Afrique
on fabrique des gadgets au lithium
bonne affaire sur la main-d'œuvre
on s'offre des séjours en Thaïlande avec de petites
friponnes
on ramène des panses décontractées et des
colliers de fleurs
tous ceux-là et tous ceux-ci
que nous saluons d'un sourire apaisé
Nous sommes bien au-delà de la misère du
monde
nous avons érigé des textes de loi
plus limpides que les eaux baptismales
enseignés dans l'amour dans la joie et dans la
paix
Nous sommes horlogers
de la grande horlogerie
Calés dans la vie comme en un vaste champ
regardez le soleil se coucher au loin
et soyez certains de sa courbure intacte
de son feu qui inonde les quatre coins du
monde
Prenez-en la mesure et prenez la nôtre
sous notre couronne
nous régnons sereinement"
La couverture est une Encre de Chine de Clémence Pierrat.
Si vous souhaitez vous procurer "Nous les derniers vivants", de Chloé Charpentier, qui est vendu au prix de 20 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://www.tarmaceditions.com/nous-les-derniers-vivants
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