Il peut paraître incongru de
prêter la forme du haïku, ce poème japonais en dix-sept syllabes, à la
description des guerres, comme le fait ici Laurent Robert, dans ce recueil
sobrement intitulé « Guerres » et qui est publié par « Le
chasseur abstrait éditeur ».
En effet, dans le haïku
classique, le poète cherche surtout à décrire l'immuabilité du cycle des quatre
saisons.
Cependant, il n'en demeure pas
moins que la guerre se joue au-dehors, donc, dans un décor marqué par la nature.
Ici, le lecteur pense surtout au conflit de 14-18, d'autant plus que des
fragments en anglais, qui émaillent les poèmes publiés ici devenant parfois
presque bilingues, sont tirés d’œuvres de poètes ayant vécu la grande guerre
(Wilfred Owen, Robert Graves).
De plus, dans sa brièveté, le
haïku traduit la brièveté de la mort, et partant, l'horreur de la guerre.
Mais le texte de Laurent Robert
ne se limite pas uniquement à ces moments de guerre. Dans son « Chant
II », il parle aussi de sexualité, de ces instants de permission entre les
guerres, dont le haïku traduit la brutalité. De l'amour comme une guerre
presque, car il faut se dépêcher de vivre avant de mourir. Ici, c'est le poète
autrichien, Georg Trakl, connu pour ses amours incestueuses avec sa sœur et son
attirance pour la mort, qui prête ses fragments, parfois, aux poèmes.
De ce point de vue, le
« Chant III » de « Guerres » semble opérer cette réunion de
l'amour et de la mort au-dehors. C'est aussi le moment de retourner sur le
front, lorsque le souvenir de l'aimée se dissout dans les machines de guerre.
Extraits de « Guerres »
de Laurent Robert :
« 13.
Heureux les soldats
Who lose imagination
Au barda sans rêve
23.
Fatale pétoire
Browning F1903
FN de Herstal
38.
De toute façon
Il n'arrive jamais rien
Herbes dans la boue » (Chant
I)
« 6
Entrer dans ton corps
S'y faire un chemin humide
Avant l'explosion
22.
Nestor Gianaclis
Ton haleine tabagique
Et bleue avalée
31.
Soupir des amants
Lamentation des non-nés
Einsame Wandeln » (Chant II)
" 6.
Le silence est rouge
Crépuscule des jacinthes
Pavots aux paupières
32.
Orphée au crayon
Dans la gadoue impérieuse
Pleure une âme morte
44.
Des fleuves brandis
Nuit de femme qui accouche
Sanies de l'aurore » (Chant
III)
Pour en savoir plus sur
« Guerres » de Laurent Robert, qui est vendu au prix de 14 €,
rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://lechasseurabstrait.com/
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