Publié par les Éditions Lurlure, "Filles bleues", d'Ivar Ch'Vavar, n'est pas complètement un livre composé de nouveaux poèmes. Mais c'est autre chose qu'une anthologie.
Sous-titré "recyclage" et ayant pour auteurs Ivar Ch'Vavar et son équipe, demeure l'idée (plusieurs fois répétée par son auteur, et c'est tant mieux) que "la poésie doit être faite par tous, et non par un".
Ici, les autrices de l'équipe sont des femmes : Alix Tassememouille, et Adrienne Vérove (pour la présentation du livre et ses notes). On peut y ajouter d'autres totems "féminins" : Sylvia Plath et Évelyne Nourtier, pourquoi pas ?
J'ai pris du plaisir à relire les poèmes d'un auteur dont j'apprécie déjà pleinement l'œuvre. Joie de retrouver ces "Nouveaux vers de la mort" et les différentes versions de "Berck plage", surtout. Et ce n'est pas rien de relire des choses qu'on aime !!!
Plaisir également de renouer avec des contraintes diverses au sein d'un même volume : depuis les poèmes rythmés, des années 80 aux plus amples vers arythmonymes des années 2000 (je pourrais y ajouter les quatrains et justifications, par exemple).
Ici, toutefois, c'est un peu comme avant et pas vraiment : ainsi, "Filles bleues" est nouveau par l'assemblage et plus profondément, par la tonalité dominante qu'il laisse passer.
Il y a d'abord, à mes yeux, la mer et sa plage. Evidemment, au-delà de ce paysage réel, existe l'horizon de l'écriture, à la fois plat et infini.
Il y a aussi les filles et cette mouette, point d'orgue du livre (poème inédit de 2018).
Présence féminine, un peu, sexualité, à coup sûr, pour moi, malgré tout, atténuée. Au contraire, ce qui m'a semblé compter, c'est la géométrie des formes. Les formes que l'on voit, et celles que l'on imagine.
Formes des corps, mais avant tout formes des choses, superposition de plans visuels, comme sont les empilements de vers. Formes abstraites, qui finalement drainent leur intense nostalgie, comme de simples vagues.
Extrait de "Filles bleues", "deux haï-kaï", d'Ivar Ch'Vavar :
"La poésie n'a aucune importance.
La nuit, l'hiver n'ont aucune
espèce d'importance. Le vent,
le froid, la viscosité,
la salinité,
le fait d'être sinistre n'ont aucune
importance.
/
Eh bien, moi je le vois très bien, ce matin
anormalement blanc, alors que toute
la nuagerie pantèle
de noirceur. — C'est un matin blanc,
— avec une mer berckoise blanche aussi —,
Elle reluit, la mer, dans un bref
crissement, c'est le silence
et l'irréalité qui l'emporte et vous
subissez un éblouissement (moi aussi)."
Si vous souhaitez vous procurer "Filles bleues", d'Ivar Ch'Vavar (et son équipe), qui est vendu au prix de 21 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://lurlure.net/filles-bleues

