lundi 27 mars 2023

"Le bonjour de Christopher Graham", de Guillaume Decourt

 

Publié par les Éditions Aethalidès, dans sa collection "Freaks", "Le bonjour de Christopher Graham" est le douzième recueil publié par Guillaume Decourt.

Contrairement à la plupart des précédents livres de l'auteur, "Le bonjour de Christopher Graham" se situe dans un seul pays, sauf que ce pays a taille de continent, puisqu'il s'agit des États-Unis.

Le recueil débute comme un roman noir : ça se passe la nuit, dans un hôtel, vu duquel le narrateur est témoin d'une agression. Cependant, il s'agit ici de poèmes en vers rimés. 

Poésie narrative, mais pas vraiment roman en vers.

En effet, plutôt que de proposer une seule histoire, l'auteur donne à lire une série de poèmes éclatés entre divers endroits des États-Unis.

Et tous les poèmes qui le composent n'ont pas la même forme. Si certains textes plus développés autorisent la narration à l'occasion d'une rencontre, d'autres fonctionnent plutôt comme des chansons, empruntant leur musicalité à la forme ancienne de la poésie versifiée, celle du rondeau. Et ici, c'est volontiers de rondeaux de marques qu'il s'agit.

Ainsi, la dimension ironique, si ce n'est parodique de "Le bonjour de Christopher Graham", apparaît comme une évidence. Si légende américaine il y a, elle existe avant tout dans les représentations cinématographiques ou commerciales que les États-Unis véhiculent à merveille. En terme d'aventures, il n'y a pas de quoi fouetter un chat.

D'ailleurs, le narrateur n'est pas dupe des scènes qu'il décrit. Et à la fin du recueil, j'avoue ne pas connaître davantage Christopher Graham, même s'il en existe plusieurs dans le monde !

Extrait de "Le bonjour de Christopher Graham", de Guillaume Decourt :

"RONDEAU DE CREST GLAMOROUS

Crest Glamorous a tout changé
Il me restait souvent des traces
De nicotine et de café
Je m'en suis débarassé grâce 
À Crest Glamorous Blanc 3 D

Et pour tout dire je ne passe
Plus un jour sans utiliser
Mon dentifrice préféré
Crest Glamorous

Crest Glamorous est efficace
De façon presque instantanée
Désormais je ne me tracasse
Plus tout au long de la journée
Crest Glamorous est mon allié
Crest Glamorous"

Si vous souhaitez vous procurer "Le bonjour de Christopher Graham", de Guillaume Decourt, qui est vendu au prix de 16 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://www.aethalides.com/catalogue/

vendredi 24 mars 2023

"Havres", de Patricia Castex Menier

 

Publié par les Éditions Les Lieux-Dits, dans sa Collection "Jour & Nuit", "Havres", de Patricia Castex Menier est une suite de poèmes divisés en plusieurs parties, qui peuvent être qualifiés de moments.

Chaque partie est introduite par un poème rédigé en italique, dont le rôle est de poser le décor, de marquer l'instant, de mettre en avant l'élément (bourrasque, forêt).

Le lecteur comprend que tous ces moments qui composent le recueil sont autant de "havres" de paix. 

À mes yeux, "Havres" est donc un livre de "sagesses", avec des poèmes aux vers courts soigneusement découpés (premier mot de chaque strophe constituant à lui seul un vers).

Ainsi, à travers tous ces poèmes, passe un même message, sobrement exprimé, qui, grâce à cela, ne paraît jamais redondant.

Le message, c'est celui-ci : il faut savoir se contenter du spectacle extérieur que le jour nous apporte.

Cette vérité est dite avec suffisamment de netteté pour que le lecteur en sorte convaincu.

Extrait de "Havres", de Patricia Castex Menier :

"Cela
suffira-t-il,

jusqu'au 
bout,

pour
être bien sur terre ?

Chaque 
printemps,

nous
n'omettons jamais

d'entrer
ensemble et tout entiers

dans
le frisson rosé du cerisier."

Si vous souhaitez vous procurer "Havres", de Patricia Castex Menier, qui est vendu au prix de 15 €, contact postal : Les Lieux-Dits éditions, 2 rue du Rhin Napoléon, 67000 Strasbourg.

mercredi 8 mars 2023

"Le bel âge", de Raphaël Laiguillée

 

Deuxième recueil publié par Raphaël Laiguillée aux Editions Gallimard, dans la collection blanche, "Le bel âge" mélange poèmes en vers et proses poétiques, certains poèmes aux longs vers finissant par tendre vers la prose.

Cet apparent désordre formel dissimule une progression raisonnée, de l'enfance vers l'âge de jeune adulte, qui constitue peut-être ce "bel âge", et donne son titre au livre.
Il faut dire qu'il s'agit naturellement de l'âge de l'amour (et aussi du désamour).

Cependant, cette progression n'est pas que chronologique. Ainsi, le sujet de ces poème (le "je" ou le pas "je") épouse étroitement les choses qui l'entourent jusqu'à se confondre avec elles, passant d'un monde lilliputien (au début) vers un monde ouvert, celui, par exemple, des nuages (à la fin).

En milieu de volume, se trouvent également placés en embuscades, plusieurs portraits de femmes;, nommées "Lauretta", "Marine", "Gradiva", "Haydée", "Jeanne", "Marie-Madeleine".

La constante de ce recueil est constitué par ses fantasmagoriques surprises dont il est fait montre en toute circonstances, ces "fantaisies à la manière de Callot", qui engendre de belles images visuelles.

Les titres témoignent aussi parfois de cette fantaisie bizarre, parfois inquiétante : "L'homme dans l'homme mort", "Chlorophylle et chloroforme".

À signaler quelques petits coups de patte bien ajustées à l'imagerie des poètes : "Les poètes seraient dans les nuages. Elle est bien bonne".

Extrait de "Le bel âge", de Raphaël Laiguillée :

"Hygiène du forcené

   Et pour le mauvais œil, j'ai la parade. Je me vitrifie. Je m'empaillette de la tête aux pieds, je m'empaillette de miroirceaux brisés.
   L'œil aveuglé, l'œil finit par tomber. Je le cingle à poignées de sable, je le cingle à le faire saigner. Il saigne, en effet.
   Alors je feins de prendre sa pupille pour une baie mûre - et je la crève, crac, entre mes doigts de promeneur distrait.
   À l'iris ! Au grand jet ! Je l'inonde, je le noie, il est fichu. Tout autour enfin, j'embrase la barbe et les sourcils.
    Reste une pauvre figure à quoi je ne peux même plus baisser les paupières."

Si vous souhaitez vous procurer "Le bel âge", de Raphaël Laiguillée, qui est vendu au prix de 12,90 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Blanche/Le-bel-age

"Une pièce manquante et autres dépendances", de Basile Rouchin

 

"Une pièce manquante et autres dépendances", de Basile Rouchin est son deuxième recueil publié (aux Éditions "Interventions à Haute Voix").

Divisé en deux, ce livre contient une première partie, intitulée "Une pièce manquante", tandis que la seconde se nomme logiquement "... Et autres dépendances".

Si la première partie est composée de courts poèmes en vers, la deuxième donne à lire de courtes proses.

Derrière cette apparente divergence formelle bien marquée règne une véritable unité de fond.

En effet, les textes de Basile Rouchin mettent en scène exclusivement des rapports sociaux, et plus particulièrement conjugaux, ou parfois de travail, ou enfin des parcours de vie, plutôt ratés.

Sous l'ironie et les jeux de mots (très fréquents dans les poèmes en vers publiés ici, dont certains sont d'ailleurs nommés "Pastiches"), la conflictualité règne, voire même la violence, alors que tout pourrait bien se passer, après tout.

Bref, "Les choses de la vie", pour reprendre le titre d'un film connu.

J'aime cette écriture précise de Basile Rouchin qui tient compte de la réalité des villes trop bondées, et dans laquelle chaque histoire, bien qu'ordinaire, est élevée au rang de singularité réaliste.

"Une pièce manquante et autres dépendances" est préfacé par Louis Dubost. 

Quant aux collages présents dans ce livre (dont celui de la couverture), ils sont de l'auteur.

Extraits de "Une pièce manquante et autres dépendances", de Basile Rouchin :

"Poésie domestique

Pas de répit, Madame,
Repu, Monsieur vous en prive.

Repas, repassage,
Biberons, couches,
Faire école aux pas sages...,

Ainsi, Madame voit sa vie aller.

Monsieur sait que
Séparé d'elle,
Il trépasserait
Sans sape, ni mots d'amour,
Les nerfs à vif, le ventre creux.

Économe, il épluche son journal
En babouche."

Et plus loin, dans le livre :

"Un matin, il découvrit sa fille inanimée sur son lit. Une bouteille d'alcool à demi vide trône. Des pilules jonchent le sol. Il enterre la jeune trentenaire, sans famille, ni cérémonie, dans un cimetière paysager. Un monticule décoré de quelques compositions florales, assorti d'une plaque de 30 cm carré y révèle une inscription à peine visible, couverte de mousse. Abandonnée par ses cinq enfants, elle termine ainsi ses jours sous ce tas de terre : sépulture nommée à juste titre, par son père, "tas de boue"".

Si vous souhaitez vous procurer "Une pièce manquante et autres dépendances", qui est vendu au prix de 10 €, contact avec l'éditeur : gerard.faucheux@numericable.fr

dimanche 5 mars 2023

"Histoires urticantes", de Pascal Dandois

 


Publié par les Éditions Douro, dans sa collection "La Bleu-Turquin", dirigée par Jacques Cauda, auteur également de la première de couverture, ces "Histoires urticantes", de Pascal Dandois sont constituées d'une série de courtes nouvelles (parfois longues d'une seule page) qui parlent exclusivement de rencontres sexuelles.

Même s'il n'oublie pas d'évoquer des autres pratiques sexuelles (cunnilingus, levrette, masturbation), l'auteur fait se tailler au sexe anal la part du lion dans ce volume. Après tout, la sexualité n'est-elle pas une histoire d'obsession ?

L'originalité de ces "Histoires urticantes", à mes yeux, est qu'elles basculent tour à tour entre plusieurs registres d'écriture différents : ainsi, le ton naturel et la sincérité du narrateur (notamment lorsqu'il évoque les difficultés pour un handicapé moteur de vivre pleinement sa sexualité) tranchent avec un réalisme parfois scatologique, voire carrément gore ou fantasmagorique.

En transperçant des anus avec son membre, c'est comme si le narrateur (et ses personnages) traversaient le mur de la réalité pour tomber dans le fantastique.

Extraits de "Histoires urticantes", de Pascal Dandois :

"...une onde d'amour Fou, de libido femelle extraordinaire se propagea dans l'atmosphère et peut-être même au-delà. Comme si une longue et profonde onde électrique avait pénétré les culs pour produire des orgasmes prostatiques en série. Cette cascade, cette épidémie d'éjaculations précoces, irrépressibles, inarrêtables, marque l'histoire humaine comme le plus catastrophique gaspillage de gamètes mâles qui fut jamais. D'autant plus qu'à la suite de cette éjaculation massive toutes les gonades de l'humanité furent asséchées définitivement." (extrait de Lève-futur")

"Il faut préciser que je suis paraplégique (je ne sens pas grand-chose sous ma ceinture) et les rapports, que j'avais eus avec elle, avaient été par conséquent, essentiellement faits de caresses soutenues, digitales et buccales, sur sa peinture, j'allais pouvoir réitérer ces expériences." (extrait de "Au restaurant d'huîtres")

Si vous souhaitez vous procurer "Histoires urticantes", de Pascal Dandois, qui est vendu au prix de 16 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://www.editionsdouro.fr/boutique/Histoires-Urticantes-p454401006