En effet, sans privilégier une forme d'écriture (proses comme poèmes en vers libres sont représentés), l'autrice fait le tour des principaux quartiers de Marseille : Belsunce, Belle de mai, Cannebière, Conception, Estaque…
Pour mes yeux de lecteur, le chaos des grandes villes n'a rarement été aussi bien représenté, et tout particulièrement le chaos d'une ville comme Marseille, qui ne ressemble à aucune autre, je le sais déjà.
Une des particularités essentielles de "À moins que Marseille" est qu'il décrit en détail l'aménagement urbain, et surtout le bordel en résultant. Malgré tout, semble se dessiner une fascination pour cet emmanchement urbanistique.
Le lyrisme du style se manifeste par l'ampleur des textes, leur flux, même s'il s'agit d'un lyrisme froid, dans lequel le fourmillement du réel est avant tout recherché. Ainsi, les descriptions qui en résultent se préoccupent constamment de coller à cette réalité.
Pour dire autrement les choses, les images, ici, ne sont pas imaginaires, elles sont inspirées par l'usage de la vue et expriment l'essentiel (qui n'est pas souvent exprimé).
S'intercalent également dans ces pages des passages autobiographiques (accouchement à Marseille, par exemple), des réflexions sur l'apparente sécession totale de Rimbaud à sa mort avec la poésie ou sur le statut de l'artiste.
Le constat d'arrivée est globalement négatif. Difficile de distinguer en effet une preuve de progrès dans ces additions de matières au détriment de l'humain. Sans compter la pauvreté effroyable qu'elle charrie.
Néanmoins, Anne Barbusse semble appeler de ses vœux une manière de s'en sortir. Une tentative de synthèse, à mener par l'artiste, justement ?
"À moins que Marseille" est abondamment illustré par les photographies d'Adèle Nègre (dont l'image de couverture).
Extrait de "À moins que Marseille", d'Anne Barbusse, ce fragment, tiré de "à la va-vite d'Aubagne à l'Estaque" :
"maisons d'armateurs tels phares déflorés
entre autoroute et hangars industriels de tôle tâchent
de faire bonne figure avec façades sculptées toits pointus
grandes
dames des siècles passés aux friches aux
quatre-voies dressées dans les zones commerciales industrielles
comme tours témoignant de la mer
seul commerce mer du milieu notre mer
maisons d'armateurs regardant vers la mer
puis autoroutes striant les terres ne regardant
que bitume/vitesse
hors sol l'autoroute
demeures ancrées dans la mer obsolète
objets d'art sans le dire massacrés
d'autoroutes conquérantes - qui regardera depuis les toits
voiles blanches ou noires départs arrivées de paquebots salés"
Si vous souhaitez vous procurer "À moins que Marseille", d'Anne Barbusse, qui est vendu au prix de 19 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://milagro-editions.com/livres/amoinsquemarseille/

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