mardi 8 juin 2021

"La portée de l'Ombre", de Marie-Anne Bruch

 
Publié par les Éditions Rafael de Surtis, dans sa collection "Pour un Ciel désert", "La Portée de l'Ombre", de Marie-Anne Bruch, est composé de courts textes en prose qui semblent se répondre, de la page de gauche à la page de droite.

En effet, le rapprochement entre ces deux types de textes, qui constituent les thèmes et ossature du livre, n'est pas d'emblée évident.

Sur la page de gauche, et en caractères italiques, Marie-Anne Bruch décrit son expérience de la folie, la vraie, la "folie qu'on enferme", pour reprendre l'expression de Rimbaud. Elle décrit dans quel état on se voit, ce que ça produit, lorsque l'on est tombé dans la folie.

Sur la page de droite, en caractères "normaux", l'autrice donne ses impressions à l'écoute de plusieurs morceaux musicaux, qui sont cités en tête de paragraphes.

Dès lors, si, en apparence, le rapport entre la folie et la musique ne coule pas de source, dans les deux cas, il y a une même introspection. Ajoutons à cela que la musique peut être aussi une thérapie, un baume pour les blessures de l'âme. Reconnaissons enfin que les thèmes musicaux sont autant de personnages heureux ou malheureux, ou les deux à la fois, qui ne sont pas nous, mais qui mettent à distance nos tristesses, en nous les montrant.

Description de la folie et écoutes musicales ont beaucoup de choses en commun, en fin de compte.

Dans ce livre, Marie-Anne Bruch se livre avec une sincérité et une simplicité remarquables du premier coup d'œil. Comme quoi, la valeur humaine d'un projet d'écriture peut faire la valeur d'un texte. C'est particulièrement évident ici. Plus que de longs discours alambiqués sur la folie, "La Portée de l'Ombre" vous montrera ce que c'est que de tomber dans la folie. Et vous vous direz peut-être, si vous êtes un peu franc du collier, que vous n'en étiez pas si loin que ça, à certains moments de votre vie.

Extrait de "La Portée de l'Ombre", de Marie-Anne Bruch :

   "J'ai remarqué que, lors de mes périodes de délire, j'étais dans un état d'éveil paroxystique : non seulement je n'arrive plus à dormir, mais ma vigilance devient extrême et mes perceptions ont une acuité décuplée. Mes émotions s'amplifient et s'expriment mieux dans ma mémoire, ma sensualité s'intensifie également, envahissant l'ensemble de mon corps, et criant famine - ou appelant au secours, comme on voudra.
    Ce débordement émotionnel et perceptif, je le vois survenir avec une certaine frayeur, un peu comme une poussée de fièvre, avec l'impression de subir le dérèglement de mon corps, de ne plus m'appartenir.
   Mais paradoxalement, lors de mes périodes de délire, alors que j'ai des croyances sur le monde qui devraient m'alarmer et me désespérer, je n'arrive plus à pleurer ou à ressentir de profonde tristesse. Il m'arrive même d'être prise de fous rires interminables en évaluant la perversité du monde et ma propre indignité."

La première de couverture est une reproduction d'une peinture de Gustave Klimt : "Musique" (1895).

Si vous souhaitez en savoir plus sur "La Portée de l'Ombre", de Marie-Anne Bruch, qui est vendu au prix de 15 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.rafaeldesurtis.fr/index.php?q=bruch

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