mercredi 31 janvier 2024

"La non-mère", d'Anne Barbusse

 

Publié par les Éditions "Pourquoi viens-tu si tard", "la non-mère", d'Anne Barbusse est une suite de courts poèmes d'une page, en vers libres.

Ici, "la non-mère" n'est pas celle qui n'a pas d'enfants, mais plutôt celle qui n'aurait pas dû en avoir. C'est la mère de celle qui écrit (l'autrice ?). On ne peut pas dire qu'il s'agisse d'un hommage. À l'inverse de la représentation consensuelle des mères qui est plus souvent donnée : aimante, douce, cette mère-là en porte surtout le titre.
Son attitude est dénoncée, mais également ses goûts, certitudes et œillères. 
Même si ce portrait n'est pas idyllique (d'ailleurs, "Le non-père" en prend aussi pour son grade, au passage), je ne suis pas certain qu'il ne fasse pas écho chez plusieurs lecteurs, car plus proche de la réalité que de la représentation désirée.

D'ailleurs, l'autrice ne se contente pas de parler de l'enfance et de l'adolescence… Elle montre combien le comportement d'une mère peut avoir de répercussions sur celui de son enfant, une fois que celui-ci est parvenu à l'âge adulte.

Ainsi, le déséquilibre initial se reproduit de génération en génération.

Si ce livre m'a plu, c'est par son côté réaliste, qui n'essaye jamais de se bercer d'illusions. C'est aussi et surtout parce qu'il s'agit d'un véritable texte de révolte. Une révolte qui ne faiblit pas (après tout, pourquoi ne pas imiter ses géniteurs dans leurs certitudes, les retourner contre eux ?).

Le style de ces poèmes est véhément et tourmenté, en même temps qu'il est riche d'images. À la sécheresse humaine répond la flamboyance du style.

Cela faisait une année au moins que je n'avais pas lu de poèmes qui préfèrent courir le risque d'agacer le lecteur plutôt que celui de ne pas dire la vérité.

Extrait de "Le non-mère", d'Anne Barbusse :

"la non-mère a des mots fixes et matériels
elle englobe les courses et tickets de caisses
elle obture la souffrance et positionne les rêves
sur des places de parking ou des queues à la caisse
elle organise la déliquescence de l'art
qui devient une culture assénée par l'école
l'écriture l'effraie
le journal intime de la petite fille défie le consumérisme
et les publicités de la boite aux lettres
s'y jouent trop d'amours défigurées par la peur
et de romantisme innomés (la no-mère
est un Charles Bovary féminin doublé d'une capacité de
décision
quand la petite fille n'est qu'une Emma de plus, désarticulée
sur la balançoire la mélancolie féminine et subjective
balance ta douleur nue"

La photographie de couverture est d'Éric Dubois.

Si vous souhaitez vous procurer "La non-mère", d'Anne Barbusse, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : www.association-lac.com

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