Publié par les éditions "Pourquoi viens-tu si tard ?", "Les mères sont très faciles à tuer", d'Anne Barbusse, est une sorte de journal de poésie.
Derrière son titre qui pourrait passer pour provocateur ("Les mères sont très faciles à tuer"), se cache une vérité éprouvée au fil des pages.
En effet, ce livre raconte, au jour le jour, la séparation d'une mère avec son fils. Il n'y a pas de véritable évolution, mais plutôt un présent permanent. L'autrice détaille les sentiments et signes d'abandon que cette séparation vitale entraîne.
Sont évoqués la nature alentour, l'extérieur, plus encore que l'intérieur de la maison, ce qui donne à ces textes une tonalité solaire, même si trop de soleil parfois, on dirait…
Bien sûr, il y a de la révolte aussi, donc de la vie.
À noter également la référence à de nombreux films, dont certaines séquences sont rappelées.
C'est d'ailleurs la caractéristique principale de ce livre. Ses images visuelles, continuelles, qui se coulent en continu dans un torrent de mots (se lisant beaucoup mieux que des poèmes en comportant pourtant bien moins).
Il y a, dans ces poèmes en vers très libres, une spontanéité qui n'exclut pas la richesse de la vision de détail.
Ainsi, la poésie irrigue naturellement les veines du lecteur.
Extrait de "Les mères sont très faciles à tuer", d'Anne Barbusse :
"les propriétaires des maisons souffrent plus que les pierres de leurs
maisons
dans la société ils arborent visages normaux
ils cachent leur maladie chez le boulanger au matin ou dans la queue
de la poste
ils ne laissent rien voir de leurs abandons et des plaies fraîches des
séparations
ils avancent ils marchent ils parlent les mots de tous les jours ouvrés
les maisons n'ont que faire de leurs propriétaires
elles se dressent face aux vents du ciel et aux orages du ciel
elles sont l'avantage des femmes sans affects
elles se comportent comme des hommes taiseux et violents
et vont plus loin que nous dans l'absolution des péchés
- elles ont pourtant, dans la brûlure de l'été, la fraîcheur douce et
maternelle
comme des mères éplorées et attaquées dans l'expression la plus
cachée de leur affection claire, et le murmure des eaux des rivières
qui descendent la pente du monde tout en riant, elles ont pourtant,
parmi les fruits sucrés et les caresses odorantes des plantes, elles ont
pourtant la réserve des piétas ridiculisées de l'intérieur, qui se couchent
sur le lit des veuves et
cessent de s'alimenter dans la nuit, cessent même d'être piétas, et
belles -
les maisons et les mères sortent alors dans les jardins
et les pêches roses et les pêches blanches sont cueillies sans indifférence
et le duvet dévoile la chair sucrée du jour, à l'ombre des corps"
L'illustration de couverture est de Catherine Andrieu.
Si vous souhaitez vous procurer "Les mères sont très faciles à tuer", d'Anne Barbusse, qui est vendu au prix de 14 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.association-lac.com/editions/catalogue.html#05
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire