jeudi 31 décembre 2020

"Au bord du vide et le soleil dans les yeux, j'ai accéléré", d'Éric Scilien

 


Publié par Bookless Éditions, "Au bord du vide et le soleil dans les yeux, j'ai accéléré" est le premier recueil de poèmes d'Éric Scilien.

Normalement, si vous aimez la poésie qui raconte des histoires, vous devriez ne jamais vous ennuyer en lisant les 48 textes qui composent ce volume.

En effet, la poésie d'Éric Scilien se rattache à ce que j'appelle la poésie de situation. Non seulement elle raconte des histoires, mais elle sait les développer, avec un début, un milieu et une fin. C'est je crois, la force, en même temps que la caractéristique, principales, de ces poèmes.

Ce n'est pas étonnant car l'auteur a d'abord écrit des nouvelles avant d'aborder le genre poétique.

À côté des poèmes de plusieurs pages, qui composent ce recueil, le lecteur trouvera aussi quelques poèmes extrêmement courts, qui sont autant de concentrés d'existences.

Extrait de "Au bord du vide et le soleil dans les yeux", d'Éric Scilien :

"SOUS CONDITION

Juliette voudrait se marier
avec
un nabab du football
de ceux qui gagnent
des centaines de milliers d'euros
net
par mois
mais "uniquement quand sa carrière
sera finie"
car elle ne veut pas
avoir
à nettoyer
ses chaussures à crampons"

Il est dommage que ce style poétique ne soit pas considéré avec autant de sérieux que la poésie purement lyrique ou plus expérimentale, par des éditeurs de grande et moyenne importance, du moins en France. Pourtant, ce n'est pas parce que l'on fait preuve d'humour que l'on est pas sérieux, me semble-t-il.

Peut-on espérer un changement des mentalités pour 2021 ? Je voudrais y croire...

La première de couverture est de l'auteur (feutres et collages).

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Au bord du vide et le soleil dans les yeux j'ai accéléré", d'Éric Scilien, qui est vendu au prix de 4,99 € (et de 6,99 € dans le format papier), rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://bookless-editions.fr/ebooks/poesie-adultes/au-bord-du-vide-et-le-soleil-dans-les-yeux,-jai-acc%C3%A9l%C3%A9r%C3%A9

samedi 5 décembre 2020

"Pensées ultérieures", de Robert Roman

 



Publié par les Editions Le Contentieux, "Pensées ultérieures", de Robert Roman, illustré par Matt Mahlen (couverture et pages intérieures), est un bel objet à lire.

Seules les pages de droite de ce volume sont occupées par une illustration et un court poème en vers libres.

Je ne sais pas si le poème succède à l'illustration (collage, en l'occurrence). En tout cas, je l'ai lu comme cela.

Les collages étant parfaitement abstraits, je me suis bien amusé à lire les poèmes qui sont en dessous. Ce qui est amusant, c'est de constater qu'il n'y a pas forcément de rapport "évident" entre les deux. S'en dégage souvent de l'humour noir, qui est renforcé par la concision de chaque texte.

Extrait de "Pensées ultérieures" de Robert Roman :

"Larmes exsangues
Colères aphones
il était temps
De rentrer sous terre"

Le livre est préfacé par Daniel Martinez.

Si vous souhaitez vous procurer "Pensées ultérieures", de Robert Roman, qui est vendu au prix de 15 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://lecontentieux.blogspot.com/

mercredi 2 décembre 2020

"Le silence des arbres", de Clémentine Plantevin

 


Publié par Citadel Road Éditions, "Le silence des arbres", de Clémentine Plantevin est le premier recueil que publie son autrice. 

Chacun des poèmes en vers libres qui le compose se situe en relation avec la nature et les saisons. Ce qui attire ici le lecteur, c'est l'équilibre existant entre la concision des poèmes et la variété de cette nature bien vivante, qui épouse le contour des personnes qui la traversent.

Ainsi, les relations existant entre le sujet des poèmes et la nature sont caractérisées par leur porosité. Les choses en sortent donc revivifiées.

Extrait de "Le silence des arbres", de Clémentine Plantevin :

"longe les orgues
la paroi te regarde

longe longe le grand basalte
qui te regarde

tu portes dans ta chair le lit de la rivière
les galets blancs
comme des grappes de souvenirs
plus vieux que ton amour
tu portes les volcans
les vies

tu longes les orgues froides dans le soleil d'octobre

tu foules pour l'aimer
la terre

marche, l'automne et son grand chalumeau
viennent rougir
en flammes de vigne vierge
tes élans vers le ciel"

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Le silence des arbres", de Clémentine Plantevin, qui est vendu au prix de 9 €, rendez-vous sur le site de son éditeur: https://www.citadelroadeditions.com/cl%C3%A9mentine-plantevin

dimanche 29 novembre 2020

"À la métamorphose", de Louise Moaty

 


La clé de "À la métamorphose" de Louise Moaty, recueil de poèmes publié dans la collection Polder de la revue Décharge, réside dans son titre et plus particulièrement dans ce mot : métamorphose, qui explique la diversité de ton et d'écriture de ce recueil.

Si quand elle touche les corps, la métamorphose peut être violente et provoquer la mort, elle participe aussi du grand ballet que font les éléments, avec, en premier lieu, la lumière. La métamorphose d'un être peut venir aussi de l'amour.

Les textes de Louise Moaty ont des qualités poétiques indéniables en ce qu'ils changent d'état très vite, passant de la violence à la douceur. ou de la joie à la tristesse, avec légèreté. C'est la vertu de la métamorphose.

Extrait de "À la métamorphose", de Louise Moaty :

"Je me lève
la nuit fourmille
des vieilles folles qui m'appellent
et la lune

je sors
l'herbe encore chaude
mais l'air frémit
je regarde je regarde c'est la peau

je vais mettre la peau de danger

dehors
la lune tourne
toupie folle
tourne avale dévore

dehors
le monde se moque
se rit de nous se moque
de moi

rire immense
roupie folle
rire
qui me remplit

la nuit avance
mes yeux se cabrent
les regards brûlent
là je deviens

je deviens loup
il est midi
aux cernes noirs
je reste un peu en l'air pour voir

jusqu'à demain je revivrai

jusqu'à demain."

La préface est d'Isabelle Baladine Howald, la première de couverture est de l'auteur.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "À la métamorphose", de Louise Moaty, qui est vendu au prix de 6 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://www.dechargelarevue.com/-La-collection-Polder-.html

samedi 28 novembre 2020

"Mémoire cash", de Jean-jacques Nuel

 


Publié par les Éditions Gros Textes, "Mémoire cash", de Jean-Jacques Nuel, est un recueil de poèmes en vers libres. Très libres d'ailleurs. Ce sont des poèmes en vers anti-lyriques, que l'on dirait aplatis sur la page. Bref, des phrases découpées en vers et avec des mots triviaux dedans : nombres, chiffres au lieu de lettres, kilomètres et même prix.

Bref, l'ensemble de ces caractéristiques forme la marque du style de Jean-Jacques Nuel.

Mais ce n'est pas grave pour le lecteur que je suis, car la poésie est ailleurs. Ici, c'est ce que j'appelle poésie de situation. De la poésie anglo-saxonne à la Bukowski (d'ailleurs cité), qui se passe dans la vieille France.

Dans "mémoire cash", Jean-Jacques Nuel évoque ses souvenirs, les différences qui existent entre le monde d'hier et le monde d'aujourd'hui.

La nostalgie et la dérision sont ici présentes, La lucidité aussi sur le parcours d'une vie, entre réussites et échecs absolus. En résumé, l'eau tiède (ni trop, ni pas assez) d'une vie normale, comme à peu près toujours est la nôtre quoi.

Extrait de "Mémoire cash", de Jean-Jacques Nuel :


FUNAMBULE

je vis trop il est vrai dans le passé
remémoré ou dans le futur
imaginé

tu me reproches avec raison
de ne pas vivre dans l'instant
présent

mais le présent n'est que la ligne
de partage
étroite
fuyante
entre le passé et l'avenir

et je n'ai pas l'adresse d'un funambule
à me tenir en équilibre
sur un fil

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Mémoire cash", de Jean-Jacques Nuel, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de son éditeur : https://grostextes.fr/publication/memoire-cash/

jeudi 26 novembre 2020

"Les confins", du Collectif Meteor

 


Quand les quatre mousquetaires (comme les surnomme Jean-Louis Rambour, dans la préface de ce livre) du Collectif Meteor, ne peuvent plus se rencontrer, à cause du confinement, ils s'écrivent à distance, chacun d'entre eux gardant naturellement son individualité profonde, dans ce match alterné de 60 poèmes.

Le lecteur y retrouve donc une écriture plus urbaine, confinée au premier sens du terme (Antoine Maine), ou plus énervée (Ramiro Oviedo), plus champêtre et/ou futuriste à la fois (Sébastien Kwiek), et plus… rare (Christophe Dekerpel).

Quatre poèmes extraits de ces échanges :

#26 - 14 avril 2020

J'ai fait le tour par la gare. Depuis la passerelle, j'ai aperçu les voies ferrées.

Je me suis demandé si l'herbe poussait déjà sur le ballast entre les rails. J'ai vu les trains qui ne partaient pas, les quais déserts. Nul amoureux nulle amoureuse venus là, figés dans l'attente de l'autre, avec le cœur qui bat boum boum.

Je me suis demandé si l'herbe poussait aussi sur les amours abandonnées.

Antoine Maine

***

#42 - 1er mai 2020

Poète confirmé

jour après jour
avec les cui-cui des rouges-gorges
les sifflets de smerles qui passent me voir
les pétales du cerisier en fleur
je fais des aérolites
je fabrique de l'air
pour soulager le cafard de la tribu
je cultive Facebook
je sème des vers
et sans faire la quête
je récolte deux likes, trois partages
un commentaire
comme preuve irréfutable de mon existence

Ramiro Oviedo

***

#36-25 avril 2020

Séparation 5

C'était quand déjà l'absence des montres au soleil
Le sel de ta transpiration sur le bout de ma langue
Le réduit du monde dans un jardin de paille
Cette fragile discrétion des jours
Les mains belles ouvertes à la terre
Nos deux corps distillés entre les herbes
Ces fois où tu portes le même chapeau que moi
Je te l'écris ce mercredi - ou plutôt un jeudi
En chaleur de ces instants vécus ensemble
Pour conjurer la mélancolie du manque
Qui cherche à ligoter le présent
Celle de toutes nos séparations
Déjà trop nombreuses
Au temps futur

Sébastien Kwiek

***

#24-12 avril 2020

À l'heure où les fenêtres s'illuminent,
où le ciel, lassé d'être bleu pour personne, embrasse la nuit
et accouche de ses premières étoiles,
j'ouvre mon Velux et me déconfine
animal, de toit en toit,
descends par la gouttière,
me couche dans l'herbe fraîchie,
lape l'eau de la mare aux grenouilles
me saoule de bourgeons enfantés
que je suce avidement,
alors défoncé, je voyage
jusqu'à l'aube nouvelle
où je redeviens homme en cage.

Christophe Dekerpel

La photographie de couverture est de Benjamin Teissedre.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Les confins", du Collectif Meteor, qui est vendu au prix de 12 €, rendez-vous sur le site de son éditeur, "La chouette imprévue" : https://www.lachouetteimprevue.com/product-page/les-confins

"Te léguant mon œil mort", de Jérôme Nalet

 


Drôle de recueil poétique que ce "Te léguant mon œil mort", de Jérôme Nalet, publié dans la collection Polder de la revue Décharge.

Le but de cette collection étant de faire découvrir de nouveaux auteurs (pour une fois, chez les éditeurs), il est parfaitement réussi. Pour une découverte, c'est une découverte !

En effet, la lecture de "Te léguant mon œil mort" a trouvé le moyen de m'étonner. Si l'auteur joue avec les mots, ayant recours aux néologismes comme on boit du bon vin, s'il y a de la rhétorique et de la brillance là-dedans, ce n'est pas une langue qui claque à vide, ce n'est pas pour uniquement épater la galerie que c'est écrit comme ça. Je ne le crois pas, du moins. 

Le but semble être plutôt de faire passer la révolte au grand jour, même si le rire pantagruélique est bien présent aussi.

Et cette histoire pleine de verbe et de verve de Bob, histoire de vous donner une idée de l'ambiance, m'a fait penser également en partie aux "Amours jaunes", du Vieux Corbière, à travers toutes ces péripéties, racontées en proses (ce sont elles que je préfère), en vers libres et même en sonnets.

Ça commence donc par la mise en route de Bob ("Cousin Bob"), ça continue par son amour, puis par son départ à la retraite et enfin par sa mort en plantation. Le tout encadré par "Te léguant mon œil mort" (qui donne son titre au recueil) et "Nous avons demandé des explications", deux autres textes en prose.

Extrait de "Cousin Bob", de Jérôme Nalet :

"Un nuisible de moins à engraisser le Bob, ah oui ! mais c'est tout lui, de notre faute encore, toujours, alors que pendant des années nous lui avons, respectabilité si tant est qu'un tel mot, tout donné, tout offert, jusqu'à ce soir encore, toujours, montagne de cadeaux, l'ingrat, l'ingrat, qui ose et ses semblables à nous renifler le derrière interminablement, jetez-leur ça c'est tout le bras qu'ils vous dévorent, les ingrats, n'auront jamais fini renifler vos derrières, explorer nos poubelles sans même songer à s'en cacher, détritus sont pour eux merveilles et leurs enfants, les poux, bains qui régulièrement tournent au drame à cause de leurs stupides modèles réduits."

Ah bon sang, quelque chose qui réveille, enfin !

La préface est de Thierry Pérémarti, la première de couverture est d'Antonin Faure.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Te léguant mon œil noir", de Jérôme Nalet, qui est vendu au prix de 6 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://www.dechargelarevue.com/-La-collection-Polder-.html



lundi 23 novembre 2020

"User le bleu", suivi de "Sous la peau", de Murièle Modély

 


Publiés par les Éditions "Aux Cailloux des Chemins", "user le bleu", suivi de "Sous la peau", sont deux recueils de poèmes réalistes de Murièle Modély. Entendez par là : qui prennent directement leur source dans le réel. 

À cet égard, si "Sous la peau" parle davantage des relations familiales (mère fille, fille mère), "User le bleu" évoque avec insistance le monde du travail, son côté très absurde, avec ses sentiments qui n'arrivent pas à sortir (ici, au travail, comme ailleurs, en dehors du boulot), car ce n'est jamais le moment et pas la place.

Murièle Modély montre tout simplement l'incommunicabilité qui existe entre les êtres.

Extrait de "User le bleu", de Murièle Modély :

"Marronnier

À l'automne
les feuilles tombent, les évaluations tombent
les chefs passent, je ressasse
d'année en année, les appréciations s'empilent
les notes de vague en vague
augmentent
et il croit
parfois moi aussi
que quelque chose va
doit
changer
comme cette fois au tout début
où l'on s'est dressé pour faire son premier pas
où depuis ce jour je marche
il marche
l'entreprise marche
tout fonctionne, tout roule
moi, sur ma chaise à roulettes
lui, dans son fauteuil à roulettes
l'exécution annuelle de notre ronde labile
et je ne comprends toujours pas pourquoi
la bonne marche de tout ce bordel
nous fait faire du surplace
comme des bêtes
dociles
dans une cage"

Si vous souhaitez vous procurer "User le bleu", suivi de "Sous la peau", de Murièle Modély, qui est vendu au prix de 12 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://aux-cailloux-des-chemins.fr/

"54 activités amusantes pour un confinement réussi", de Salvatore Sanfilippo

 


Publié par les Éditions Gros Textes, "54 activités amusantes pour un confinement réussi", de Salvatore Sanfilippo, n'a pas d'autre ambition que de faire rire ou sourire le lecteur.

En même temps, cette prétention est assez rare en poésie. De là à dire que ce qui est rare est précieux, il n'y a qu'un pas. Et même si je ne le franchis pas, je constate qu'il est plus courant, à l'inverse, de trouver des poèmes qui essayent de nous angoisser !

Il n'y a pas non plus de révolte ici, comme il y en a, par exemple, dans les poèmes de Prévert.

Dans ce recueil, Salvatore Sanfilippo écrit des variations fantaisistes sur les possibles façons d'occuper son confinement (mot devenu à la mode en 2020, avec cette épidémie de Covid 19 qui n'en finit pas), comme de le vivre, car ce confinement a l'art de nous rendre un peu plus fous que d'habitude !

Et puis, il y a d'autres poèmes, sur des sujets divers, comme celui-ci, par exemple :

"Ceci n'est pas un poème d'amour

Ceci n'est pas un poème d'amour
C'est un poème
Où on se cherche
Des poux dans la tête
Où on s'envoie des mots moches
Où on se fait des reproches
Où on déverse sa rancœur
Il faut de temps en temps
Vider son sac
Dire ce qu'on a sur le cœur
Pour remettre les pendules à zéro
Mais après
On se trouve tout penaud
d'avoir fait de la peine
D'avoir dit des choses
Pas gentilles
Sous l'emprise de la colère
Alors on regrette
Pardon
J'ai dit des bêtises
J'étais énervé
Je suis qu'un imbécile
Et on tombe dans les bras
On se fait des câlins
Parce que quand même
On s'aime bien hein ?

Ps finalement c'est peut-être...
un poème d'amour"

Les belles illustrations de 1ère de couverture, ainsi que celles des pages intérieures, sont de Chrisal, qui a déjà collaboré à d'autres recueils de Salvatore Sanfilippo.

Si vous souhaitez vous procurer "54 activités amusantes pour un confinement réussi", de Salvatore Sanfilippo, qui est vendu au prix de 8 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://grostextes.fr/publication/54-activites-amusantes-pour-un-confinement-reussi/

dimanche 15 novembre 2020

"Anges profanes", de Frédérick Houdaer

 


Publié par les Éditions La passe du vent, "Anges profanes", de Frédérick Houdaer, regroupe trois recueils aux titres engageants : "Angiomes - Engelures - Engeances". Il s'agit de la réédition de cette trilogie de textes parus initialement de 2005 à 2012 (par le même éditeur).

Jean-Marc Flahaut, dans sa préface, fait part de sa découverte décisive des poèmes de Frédérick Houdaer. C'est que cette poésie-là, qui est inspirée de la poésie anglo-saxonne (par exemple, celle de Bukowski, de Brautigan), était une denrée rare en France, surtout à la fin du siècle dernier.

En effet, cette poésie s'appose au lyrisme d'images du vieux monde. Cependant, avec Frédérick Houdaer, non seulement, les poèmes en vers libres racontent des histoires, mais en plus, c'est comme si chaque poème était un micro-roman.

Et qui dit narration ne dit pas forcément humour ou jeux de mots. Ici, il n'y a que la mâchoire qui rigole. Il est souvent question des rapports difficiles entre personnes de sexes différents, voire entre les humains. Ainsi, ces poèmes ont un côté subversif permanent. 

Enfin, la vraie permanence de ces textes est constituée par la soif d'écrire envers et contre tout.

Extrait de "Anges profanes", de Frédérick Houdaer :

"INDICE DE PROTECTION

nous ne sommes pas partis en vacances
cette année
au lieu de fouler le sable de la plage
nous foulons le bitume d'un parking de supermarché
et ma femme
au lieu de se plaindre
ferait mieux d'ouvrir les yeux
ici
piscines à vendre
coques de plastiques imposantes
crénelées
et le soleil qui frappe ces énormes coquillages ouverts"

L'illustration de couverture est de l'auteur (modifiée d'après une photo originale).

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Anges profanes", de Frédérick Houdaer, qui est vendu au prix de 15 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://lapasseduvent.com/Anges-profanes.html?indextitre=4&titre=A#livre929

lundi 9 novembre 2020

"poésie assistance 24 h/24", de Perrin Langda



Publié par les éditions de la Boucherie littéraire, dans sa collection "Sur le billot", "poésie assistance 24 h/24", de Perrin Langda, est un recueil de poèmes résolument 2.0.

Contrairement à ce que le lecteur pourrait croire, il n'y a pas dedans, de rejet total du monde d'Internet. C'est vrai que nous n'en sommes plus là. Il vaut mieux vivre avec, en gardant un peu de distance humoristique. C'est ici le ton adopté par Perrin Langda, dans ses poèmes.

Ainsi, j'ai trouvé intéressant, la façon dont l'auteur s'approprie le langage Internet, tout particulièrement, d'un point de vue formel.

Souvent, les poèmes ont des vers courts. Ils se présentent sous forme de listes. Les nombres y sont nombreux, les numérotations également, ainsi que les caractères spéciaux, parfois. La pratique des "j'aime" d'un certain réseau social y est aussi relayée. Enfin, pour celles et ceux qui voudraient réviser leur vocabulaire informatique, ces poèmes sont un "must". On trouve même un lexique des termes utilisés en fin de volume.

Extrait de "poésie assistance 24h/24", de Perrin Langda :

résidence de l'humanité
(poème immeuble)

au 4e un bébé braille
au 3e des ados baisent
au 2e les Bertinardi
regardent un film à fond
au 1er des vieux ronflent
au rez-de-chaussée
quelques rats grouillent
et 6 pieds sous la terre
on n'entend plus un bruit

Si vous souhaitez en savoir plus sur "poésie assistance 24 h/24", de Perrin Langda qui est vendu au prix de 13 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://laboucherielitteraire.eklablog.fr/

Ce livre est disponible, sur commande, dans toutes les bonnes librairies de France et de Navarre.

dimanche 1 novembre 2020

"Détachant la pénombre", de Marine Gross

 


"Détachant la pénombre", de Marine Gross, publié par Tarmac éditions, succède à "De la main à la chute", premier recueil que j'ai édité en 2018, à l'enseigne du Citron Gare.

Les mots sont le sujet et l'objet de ce livre. Le lecteur peut le constater très vite, puisque chacun de ces poèmes très courts, abrupts comme un mur (deux par page, en vis à vis), commence par le mot "Mots".

Plus que sujet, l'idée me plait que les mots soient l'objet de ces poèmes. Je peux ainsi les visualiser dans des postures et situations diverses.

Extraits de "détachant la pénombre", ces trois poèmes de Marine Gross, glanés au fil du recueil :

"Mots froids et anguleux
Qui chutent
Et mordent la figure
Au pied de la stèle
Un amas de cailloux
Silencieux"

"Mots assoupis sur un lit d'humus
Enfouis dans la fraîcheur du soir
À l'abri d'un monde géométrique"

"Mots à peine mâchés
Déglutis à coup de poing"

L'illustration de couverture est de Denis Heudré.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Détachant la pénombre", de Marine Gross, qui est vendu au prix de 12 €, rendez-vous sur le site des éditions : https://www.tarmaceditions.com/detachant-la-penombre

"Voyage Grand-Tournesol", de Murielle Compère-Demarcy et Khaled Youssef

 


À travers "Voyage Grand-Tournesol", publié par Z4 Editions, Murielle Compère-Demarcy et Khaled Youssef nous convient à un quasi-tour du monde, visiteurs de pays pas toujours très connus des lecteurs, par exemple : Ethiopie, Zanzibar, Iran, Myanmar, Liban, Georgie, Cuba, Colombie…

Alternent ici poèmes en vers libres et textes en prose, dans lesquels transparaissent la beauté préservée de mondes en péril, par la folie des hommes.

Dans ce livre, la poésie se fait célébration.

Extrait de "Voyage Grand-Tournesol", ce poème de Murielle Compère-Demarcy.

"Âmes nomades leur sédentarité
ondule voyageuse sur les vagues du sable

Chaque Bédouin diffuse lueurs des siècles
et des siècles cheminent dans le cœur des ancêtres

Au pied des dunes à dos de chameau
le soleil danse sur sa monture
l'ombre puise le bleu de l'eau
les doigts du sable brûlent dans la noirceur du Kohl

Petra tous les chemins mènent dans la chaleur de tes bras
où repose la vie respire la beauté nabatéenne
L'instant
ce rêve à vivre tant qu'il est temps
dessine sur le sable
l'éternel cheminement des âmes

Âmes nomades leur sédentarité
ondule voyageuse sur les vagues du sable"

À noter également la préface de Chiara De Luca et trois poèmes de Basia Miller, traduits de l'anglais par Murielle Compère-Demarcy.

La photographie de couverture est de Khaled Youssef.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Voyage Grand-Tournesol", de Murielle Compère-Demarcy et Khaled Youssef, qui est venu au prix de 18 €, rendez-vous sur le site des éditions : https://z4editions.fr/publication/voyage-grand-tournesol/

lundi 26 octobre 2020

"Père. Le roman du", de Jacques Morin

 


Étrange recueil, que « Père. Le roman du », de Jacques Morin, publié par les Éditions Henry.

D’abord intitulé « Roman », alors qu’il s’agit de poésie, du moins dès la deuxième partie du livre, qui en compte cinq.
Ensuite, par son drôle de titre pas drôle, car tronqué.
Au début, pourtant, c’est très clair. À travers des fragments en proses, l’auteur parle de son père, ou plutôt, il évoque des bribes de souvenirs qu’il a de lui, du peu de rapports qu’il a entretenus avec lui, du fait aussi, de sa disparition sans doute prématurée.
Puis le projet de parler du père a l’air de tourner court, et laisse place à des poèmes aux vers courts, rasés de près, comme surveillés de près, dans lesquels Jacques Morin est devenu lui-même père, puis grand-père.
Mais au fil des parties de ce livre, qui succèdent à l’initiale, la paternité de l’auteur semble escamotée à coups de pudeur et d’abstraction, à l’inverse du projet de tout dire des premières pages. Le lecteur ne saura pas finalement, ce que c’est que d’être père, dans ce livre ! Il reste sur sa faim, en retard sur un nouveau dessein.
Quelque chose veut s’exprimer qui ne fait qu’affleurer à la surface. Même chose quand il s’agit de sexualité et d’amour.
Enfin, si je puis dire, arrive, après toutes ces années, le spectre du vieillissement, forcément malvenu. Et là, de nouveau, les choses redeviennent plus claires. Cependant, est réaffirmée la fidélité à soi et à celle et ceux que l’on aime.

Extrait de « Père. Le roman du », de Jacques Morin :

« pour toi j’ai une immense compassion
sans borne sans limite

si tu souffres je souffres
la douleur n’est pas située
elle reste entière
c’est toujours la question fondamentale
le couple ou la solitude

l’impression d’être à moitié
incomplet

et la fragilité de l’amour
tout au bord du divorce des cœurs
de la séparation des corps »

La vignette de couverture est d’Isabelle Clément.

Si vous souhaitez vous procurer « Père. Le roman du », de Jacques Morin, qui est vendu au prix de 8 €, rendez-vous sur le site de l’éditeur : https://www.editionshenry.com/index.php?id_article=559

dimanche 18 octobre 2020

"Banana split", de Christine de Rosay

 


Publié par les Éditions Le Contentieux, "Banana split", de Christine de Rosay porte bien son sous-titre de "dizains érotiques".

Et comme le dit sobrement Jean-Marc Thévenin dans l'introduction, le titre de "Banana split" est facile à expliquer : "La banane évoque le pénis, la glace les couilles, et la chantilly comme l'excitation de l'ensemble".  Au moins, les choses sont claires !

Dans ce recueil, les dizains, qui viennent après une pratique assidue  des sonnets, sont donc des poèmes d'union sexuelle. Mais à travers ces poèmes, pointe l'ambiguïté ou la confusion des sexes. D'ailleurs, même le prénom de l'autre, Dominique, tient de la femme et de l'homme.

En tout cas, le bonheur n'est pas ambigu dans ces poèmes.

La photographie de couverture est de Vincent Traoré.

"La faiblesse saumon des cartilages
J'entre dans ton sommeil whisky hors d'âge
Vulve serrure en nos trousseaux de clefs
Te léchant par amour le mont pelé
Des petits pieds coulissent baskets jaunes
Les souvenirs tout au bout est le Rhône
Dorment en rond les chattes par ennuis
Sur ta culotte est ma langue sans bruit
Plane alchimie les secrets de jeunesse
Domi tu dors tes seins que je caresse."

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Banana split", de Christine de Rosay, qui est vendu au prix de 6 €, rendez-vous sur le site de son éditeur : https://lecontentieux.blogspot.com/

"J'ai commencé à dessiner des anges", de Catherine Andrieu

 

Publié par les Éditions Rafaël de Surtis (qui ont déjà édité précédemment plusieurs livres de Catherine Andrieu), dans sa collection "Pour un Ciel désert", "J'ai commencé à dessiner des anges" est un recueil de textes en prose d'une page, qui font face à des dessins joliment colorés (sur la page de gauche) de l'auteur (dont celui de la première de couverture).

Qui est l'ange ? C'est la femme bien sûr, accompagnée de son ange gardien (ou de son prince charmant en attente de métamorphose ?) : le chat.

Ici, les proses arrivent après les images. En tout cas, elles les commentent. La caractéristique de ces textes, c'est qu'ils font montre d'une sensibilité peu ordinaire, racontant sans fard l'histoire entre une femme et son chat. Histoire d'amour ? Pas seulement. Histoire de mort aussi.

Dans "J'ai commencé à dessiner des anges", enfance (naïveté) et adolescence (écorchure) sont liés dans l'âge adulte. Et il en faut, du courage, pour aller aussi loin dans l'expression de la lucidité. 

La préface est de Jacqueline Andrieu, la sœur de l'auteur.

Extrait d'un des textes de "J'ai commencé à dessiner des anges", de Catherine Andrieu :

"Sur le dessin la femme n'est pas belle. On dirait qu'elle n'a pas de mains. Peut-être l'enfant n'a-t-elle pas réussi à lui dessiner les mains...On dit que pour juger de la qualité d'un peintre, il faut regarder ses visages peints et ses mains. J'ai tout faux ! À moins que la femme ne saigne à gros bouillons… Le chat est trop gros aussi, il est à peine esquissé… Il n'y a rien de plus jouissif que de dessiner la silhouette d'un chat, même si ma sœur trouve que mes chats ressemblent parfois à des lapins. Là où tu vas, mon vieux chat, je te suivrai. Toutes mes amours sont mortes, je suis dans le vide. Je n'ai que toi au monde… Dis-moi si tu meurs ou si tu meurs pas. Faudrait savoir des fois !... Je veux ton corps dans la poussière d'étoiles. (…)"

Si vous souhaitez vous procurer "J'ai commencé à dessiner des anges", de Catherine Andrieu, qui est vendu aux prix de 17 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.rafaeldesurtis.fr/index.html

Ou sinon, le site de l'auteur : https://www.catherineandrieu.fr/j-ai-commenc%C3%A9-%C3%A0-dessiner-des-anges/

jeudi 8 octobre 2020

"Étreintes mystérieuses", de Philippe Mathy

 

Publié par les Éditions "L'Ail des ours", dans sa collection "Grand ours", "Étreintes mystérieuses", de Philippe Mathy, est un recueil de proses poétiques.

Ce livre m'a plu pour ce qu'il ne montre pas en premier lieu.

En effet, il est ici question, pour résumer, des variations de la lumière dans la nature, selon les saisons. Un thème très classique, dans le domaine de la poésie.

Cependant, j'ai été étonné par la solitude qui se dégage de la description de ces paysages autant intérieurs qu'extérieurs.

L'auteur semble chercher à ne pas du tout exister à travers ce qu'il voit, et c'est très réussi, de ce point de vue. Si la nature est idéalisée, elle n'est pas pour autant rendue forcément attachante.

À cet égard, le deuxième texte qui compose ce court volume, est intitulé "Au bord de l'encre", constitue comme une explication de ces "Étreintes mystérieuses", qui montrent le rapport de leur auteur aux choses, avec une citation de Lao-Tseu : "celui qui sait ne parle pas, celui qui parle ne sait pas".

Extrait de "Étreintes mystérieuses" :

"En vain le vent d'été court sur les chemins, froisse l'herbe, les robes des fleurs accrochées aux talus. En vain le vent d'été cherche à reprendre son souffle près du vieux mur du cimetière que la chaleur n'atteint jamais. Il faudrait pourtant qu'il emporte avec lui les rêves et les prières des vivants. Elles pèsent sur les morts comme nénuphars sur un étang."

Les illustrations (dont celle de couverture) sont de Sabine Lavaux-Michaëlis.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Étreintes mystérieuses", de Philippe Mathy, qui est vendu au prix de 6 € (+ 2 € de frais de port), rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://www.editions-aildesours.com

samedi 3 octobre 2020

"Sous la ramée des mots", de Georges Cathalo

 


Publié par les Éditions Henry, "Sous la ramée des mots", de Georges Cathalo est un recueil de courts poèmes dédicacés à des amis, souvent collègues de poésie, quelques-uns étant hélas décédés.

Dans ce livre, je retrouve les caractéristiques du style de son auteur : si les vers sont libres, ce sont de vrais vers, bien découpés (pas des phrases découpées en vers) et le résultat est une série de textes clairs, qui se lisent bien, sans prise de tête.

Ainsi, ces poèmes, tout en appelant par leurs indignations à un changement de monde incertain, occupent en même temps toute la largeur du réel.

Extrait de "Sous la ramée des mots", de Georges Cathalo :

"Soirs 

                                                                                                                    à Christian Rouquayrol
de certains soirs
où tout est si paisible

on ne retient
que la rougeur du couchant
le parfum des lilas
et la clémence du destin
si l'on peut dire

le destin le hasard
ou tout autre chose
qui ne nous ménage guère
mais nous épargne parfois
à parts égales."

La vignette de couverture est d'Isabelle Clément.

Si vous souhaitez vous procurer "Sous la ramée des mots", de Georges Cathalo, qui est vendu au prix de 8 €, rendez-vous sur le site de son éditeur : https://www.editionshenry.com/index.php?id_article=557

vendredi 2 octobre 2020

"Quand je serai jeune", de Daniel Birnbaum

 


Publié par les Éditions p.i.sage int.érieur, collection sous-titrée malicieusement "3,14 g de poésie", "Quand je serai jeune", de Daniel Birnbaum évoque des souvenirs d'enfance avec mélancolie. Car bien sûr, le temps a beaucoup passé.

Malgré tout, il faut reconnaître que l'on n'est jamais aussi jeune que quand on vieillit pour parler bien de ces choses-là (logique, en fin de compte). C'est la signification principale que je retire de ces poèmes, tant il est vrai que l'enfance constitue à elle seule un réservoir de poésie inépuisable.

Les poèmes sont en vers libres, en police de caractères normale, et comportent un titre, ou bien sont en italique et sont dépourvus de titres. Ainsi, si les premiers types de textes me semblent faire référence à des souvenirs assez précis, les deuxièmes paraissent davantage comme des commentaires détachés de toute anecdote.

J'avoue ma légère préférence de lecteur pour les poèmes avec titres, qui comportent nombre de trouvailles, que je qualifierai de poétiques de situation.

Par exemple, dans "Défilé" :

"Enfant ce que j'aimais
dans les fanfares
c'était la grande caisse
cette espèce d'énorme tambour vertical
posé sur une bedaine plus ou moins proéminente
qu'on bat avec insistance
tout en marchant sans voir ses pieds

la grosse caisse qui résonne
dans une rue enfiévrée
faisant vibrer des tympans bienveillants
et qui résonne encore
jusqu'à ce qu'il n'y ait plus personne
pour vous montrer où mettre les pieds."

La photographie de la couverture est de Sophie Desseigne.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Quand je serai jeune", de Daniel Birnbaum, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.p-i-sageinterieur.fr/

dimanche 27 septembre 2020

"Quelques épaves particulières", de Sydney Simonneau

 


Derrière ce livre auto-édité, à savoir "Quelques épaves particulières", de Sydney Simonneau, se cache un texte astucieux.

Marqué par la Bretagne (il y a quelques passages rédigés en breton) et donc par la mer, ce récit de découvertes est une fausse histoire marine.

Ainsi, les épaves découvertes par cette bande de copains qui partent en plongée ne sont pas celles que l'on imagine. Je ne vous en dis pas plus, de peur de déflorer le livre.

Extrait de "Quelques épaves particulières", de Sydney Simonneau :

"Quelque chose d'anormal allait assurément se mettre en scène. Recueilli dans le tamis de ma mémoire, mis en lumière par cette errance des profondeurs, un scénario d'exception commençait lentement à s'élaborer. Il ne restait plus qu'à le laisser nous aborder…

Ce fut Clément qui repéra le premier la masse étonnante qui gisait derrière un bloc de granit. En partie recouverte de berniques et d'ormeaux, la chose paraissait ruminer de vieilles tempêtes.

"Ces radios libres dont on parle beaucoup et qu'on entend si peu" - Libération du 7/06/1978"".

Les illustrations couleur de la couverture et des pages intérieures sont de l'auteur.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Quelques épaves particulières", de Sydney Simonneau, qui est vendu au prix de 15 €, contact de l'auteur : fasyval@wanadoo.fr

"Poèmeries", de Frédéric Chef

 


Non, la bonne poésie rimée n'est pas morte ! En voilà un parfait témoignage, à travers ces "Poèmeries" de Frédéric Chef, publiées par les Editions Traversées, recueil de sonnets.

Ce que j'entends par bonne poésie rimée ? De la poésie où l'on n'entend pas que les rimes, mais où tout le texte devient musique et rythme, donc vrai plaisir de lecture.

Ici, les thèmes sont plutôt classiques et éternels : "Vanités", pour célébrer les amours passées, ""Hommageries", pour rendre hommage aux œuvres des poètes aimés ou même connus, et "Voyageries", pour évoquer des pays touristiquement parcourus.

Malgré ces thèmes classiques abordés, les licences stylistiques existent, qui feraient bondir les pharisiens du vers classique. Par exemple, ces mots coupés en deux et rejetés au vers suivant.

Mais l'essentiel n'est pas là, à mes yeux, comme résumé plus haut.

Extrait de "Poèmeries", de Frédéric Chef :

"Sur un tertre perché le parlement au pa-
lais du peiple défie les pesanteurs du temps
son béton se lézarde et créé les embarras
du pouvoir et les visiteurs dociles en rangs

se pressent chez Sissi l'impératrice dans
Versailles aussi avec ses galeries sans glace
au long des couloirs nus où le marbre rampant
le dispute au cristal de Bohême les grimaces

qu'on fait n'y changent rien le Génie des Carpates
avait bien fait les choses et les superlatifs
qu'égrène vif le guide à ces jeunes démocrates

agacent on a chassé d'ici comme des chiens
les habitants le ridicule tue comme empalait
Vlad Tepes les Ottomans et d'autres plébéiens

(Bucarest).

Ce livre est préfacé par Bertrand Degott.

L'aquarelle de la première de couverture est une aquarelle de Jean-Claude Pirotte, autre poète célébré dans ce volume.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Poèmeries", de Frédéric Chef, qui est vendu au prix de 15 €, rendez-vous sur le blog des éditions : https://revue-traversees.com/les-editions-traversees-2/

jeudi 10 septembre 2020

"la vie, et caetera", d'Henri-Michel Polvan

 


Publié par les Éditions Le Contentieux, "La vie, et caetera", d'Henri-Michel Polvan n'est pas un texte poétique en sens strict du terme. Des poèmes ne sont pas publiés ici. Le texte de "la vie, et caetera" se présente comme un récit découpé en chapitres, qui séparent les différentes étapes de la vie d'un être humain : "Genèse", "Élaboration", "Apogée", "Déclin" et "Fin".

Cependant, "la vie, et caetera" est un texte on ne peut plus poétique par son contenu. J'ai particulièrement apprécié le ton humoristique employé par l'auteur, qui créé de la philosophie bidon -j'aime bien quand on se moque de la philosophie sentencieuse - en jouant sur les mots. C'est une façon efficace de dédramatiser des choses sérieuses, comme l'amour ou la mort. Cette légèreté de ton constante, qui a quelque chose d'aristocratique (hors du temps), permet de survoler la vie sans rencontrer trop d'encombres.

Extrait de "La vie, et caetera", d'Henri-Michel Polvan :

"Le début de la descente ne se distingue en effet que très confusément de la fin de la montée. Il peut même arriver que le palier, entre les deux, soit assez long pour qu'on le croie perpétuel. C'est un sentiment qui laisse traîner par-ci, par-là, une petite illusion d'éternité, mais rien de grave. Au contraire : lorsque c'est le cas, le sujet en profite pour trouver la vie belle, ce qui l'entraîne dans une sorte de campagne publicitaire en faveur de sa conception, et qu'il va en développant auprès de tous ceux qui veulent bien l'entendre."

Le dessin de couverture est de Pascal Ulrich.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "La vie, et caetera", d'Henri-Michel Polvan, qui est vendu au prix de 8 €, rendez-vous sur le blog des éditions : https://lecontentieux.blogspot.com/

lundi 31 août 2020

"Lapidaires", de Gabriel Zimmermann

 

Publié par les Éditions Tarabuste, dans sa collection "DOUTE B.A.T.", "Lapidaires", de Gabriel Zimmermann est le quatrième recueil édité de l'auteur.  De dimensions importantes (174 pages), "Lapidaires" regroupe des poèmes divers, mais à la densité singulière.

La poésie de Gabriel Zimmermann est-elle une poésie naturelle du dehors, comme chez beaucoup de poètes lyriques ? Pas vraiment. Plutôt que de promenades, il s'agit plutôt d'échappées vers le dehors qui finissent immanquablement à l'intérieur, voire dans un tombeau. Le jour ici en appelle à la nuit, sans que le désespoir s'installe pour autant. 

De plus, les formes que prend la nature sont souvent figées (les pierres sont très présentes). Ce n'est pas le vert ou le bleu qui parcourt de préférence ces objets inanimés, mais plutôt le noir et le blanc. Comme dans un film ancien, comme si l'action était avant tout une représentation légendaire d'un peuple défunt (les étrusques sont évoqués à un moment).

Parfois aussi, il y a des souvenirs d'enfance qui reviennent. Avec ce compagnonnage mystérieux avec l'autre, le disparu ? Avec cette communion d'inspiration religieuse.

Cette ambiance est très bien résumée par plusieurs des titres des différentes parties du livre, par exemple : "Des furtifs", "Itinéraires accompagnés de prières", "Sculptures étrusques qui font salve de mémoire", et "Au lendemain des reliques".

Extrait de "Lapidaires", de Gabriel Zimmermann :

"Je te le dis avant que des voix nous recouvrent
Bientôt mes mots se perdront parmi des cris sans mémoire
Et face à ma bouche hagarde
Tu répondras que la parole a besoin de décombres

Écoute un ami, diras-tu
En cherchant ma main dans l'ombre
Le soir peut falsifier, quittons la fête inerte
Et rentrons chez nous par un chemin sans montueux

Dans moins d'une heure,
le sommeil unira nos maisons

Pourquoi ajourner la paix qui s'offre ?
Demain, grâce à ta tendresse
Je reviendrai vite à mon visage

La veille, où mon regard ralentissait
Jusqu'à imiter l’œil troué des fantômes,
Se sera diluée dans un songe blanc

Avant un repos d'innocents
Prends mon épaule
Nous marcherons humblement, en respirant le vent noir,
Prêts à chuter d'un même souffle."

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Lapidaires", de Gabriel Zimmermann, qui est vendu au prix de 15 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.laboutiquedetarabuste.com/fr/contacts

lundi 17 août 2020

"Pages", de Philippe Jaffeux

 




Publié par les Éditions "Plaine page", dans sa collection "Calepins", "Pages" de Philippe Jaffeux, dont voici la couverture (ci-dessus), associe à chacune de ces pages, un texte qui forme un tout et qui est consacré à un style musical, à un musicien, de jazz ou de rock, à une oeuvre de musique classique, ou à un instrument.

Ici, le livre comporte 52 pages, comme il y a 52 semaines dans une année.

De même que les musiciens sont virtuoses de leurs instruments, "Pages" est un exercice de virtuosité. Car Philippe Jaffeux utilise, pour chaque texte, toutes les ressources de la mise en page informatique : police de caractères différentes, formes imprimés en fond de page, textes écrits à l'envers, remplissage des fonds d'écriture etc.

"Pages" est d'ailleurs sans doute le texte le plus accessible de Philippe Jaffeux que j'ai lu, car l'écriture n'est plus son propre sujet, mais bel et bien la musique décrite. Et la musique est aussi écriture (de notes), la musique peut être composée selon certaines formes (fugue, par exemple), la musique peut se faire imitative (du chant d'un oiseau), les sons forment eux-mêmes des oscillations qui peuvent être représentées sur la page. 
Bref, la musique peut donner lieu à des représentations visuelles. C'est ce qui se passe dans ces "Pages", de Philippe Jaffeux.

Quant au texte écrit, il décrit avec précision les caractéristiques de chaque style musical. 

Par exemple, fragment extrait de "Air de la reine de la nuit" (musique de Mozart) :

"Le deuxième air de la Reine de la nuit exprime la performance d'une lune qui met en page le rôle d'une bouche transfigurée La vibration époustouflante d'un chant lyrique cisèle des lignes de mots tendus par les cordes vocales d'une interprète virtuose La voie d'une page paroxystique s'articule avec une soprano colorature qui défie les confins de la voix suraiguë L'éclat d'une cascade de vocalises résonne dans la respiration féerique d'une mélodie irréelle Le royaume de la nuit libère la souplesse d'une tessiture qui règne sur un contraste illisible L'appel d'une limite périlleuse reflète le drame d'une écriture soulevée par le rythme d'une performance affolante..."

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Pages" de Philippe Jaffeux, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.plainepage.com/

lundi 10 août 2020

"A fleur de peau", de Catherine Andrieu, suivi de "Interview"

 

Publié par les Editions Vincent Rougier, dans la collection "Ficelle", "A fleur de peau" de Catherine Andrieu est partagé, d'une part, entre une préface d'Etienne Ruhaud, ainsi qu'un entretien avec l'auteur conduit par sa sœur, Jacqueline Andrieu, et d'autre part, douze poèmes.

"A fleur de peau" - recueil qui introduit volontairement d'emblée le lecteur dans l'univers du poète édité - porte bien son titre.

En effet, s'agissant des douze poèmes publiés ici, ils témoignent, derrière leur apparente naïveté - il est notamment question de l'histoire d'un petit chat - d'une sensibilité à fleur de peau. Et rarement, l'écart aura été aussi fort entre le côté clair et le côté sombre des choses, ce qui fait le prix de ce recueil.

Derrière cet univers tourmenté existe la fragilité du poète, et derrière cette fragilité, il y a la laideur de la vie réelle, qui dicte la nécessité de s'en échapper par l'écriture, mécanisme bien connu des poètes.

À cet égard, l'entretien qui suit "A fleur de peau" a le mérite de montrer d'où vient le carburant de la poésie. J'aime cette franchise dans l'expression.

Car on ne choisit pas d'être poète, je le crois aussi. La vie le fait pour nous.

Les images sont de Vincent Rougier.

Extrait de "A fleur de peau", de Catherine Andrieu :

"5.

Sur ton dessin il y a une maison
Avec le toit pointu et des chats qui se
transforment
En cheminées
Sur ton dessin le soleil est plus gros que la fenêtre
Et la fleur, que maman.
Sur ton dessin il y a papa qui a quatre doigts
Il est tout petit à côté de moi.
Sur ton dessin papa ne boit pas
Et maman a des ailes pour butiner.
Sur ton dessin il y a une plante carnivore
Qui te vomit. A l'école le Monsieur
N'a pas le droit de te toucher
Là, tu sais, entre les jambes.
Sur ton dessin le ciel est noir et je crache du sang
La chat est tombé dans la cheminée
Le soleil ne peut entrer dans la chambre
Le toit pique comme un cactus.
Mais sur ton dessin je suis là, petite sœur.
N'oublie pas de tracer le chemin qui conduit hors
                                                                  du dessin."

Si vous souhaitez en savoir plus sur "A fleur de peau", de Catherine Andrieu, qui est venu au prix de 13 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.rougier-atelier.com/?product=ficelle-n142-a-fleur-de-peau

"Le premier pas", de Chloé Landriot et Marie-Colette Gazet-Vibien

 


Publié par le "Cahier des Passerelles", dont c'est le numéro 38, "Le premier pas" est un recueil qui associe à égalité textes (page de gauche) et images (pages de droite).

Ici, les poèmes en vers libres sont de Chloé Landriot, et les linogravures (dont celle de la première de couverture) de Marie-Colette Gazet-Vibien.

La principale caractéristique de cette publication est, pour moi, la communion constante de la poétesse et de l'artiste avec la nature, sans que celle-ci soit pour autant détaillée en ses composantes. Il s'agit, en effet, de rassembler en soi cet espace que l'on est allé chercher à l'extérieur de soi, suivant le cycle du jour et de la nuit. 

Ainsi, ce "Premier pas" qui est accompli, est générateur de plénitude.

Extrait de "Le premier pas" de Chloé Landriot :

"La source est le silence

Tu as déjà tout reçu
Tu ne peux plus que donner
Car l'infini de ce que tu as reçu
Jamais
Ne s'épuise
Dans le don

La source bouillonnante
Est sous la peau de ton visage
Dans tes mains tendues pour l'offrande
Source jaillissante au lieu même du don
Acte et source
Et aboutissement
La source est le regard
Auquel tu as renoncé par amour
(Il te faut devenir un être sans image)
La source est le toucher que tu sens
Quand personne ne te touche
La source est le silence
De la question amère
Vidée de sa lèpre antique
Abandonnée un jour - tu ne sais quand - sur un banc de 
soleil
Et qui ne laisse en toi
Sur ton cœur
Pas plus qu'un fil défait qui ne retient plus rien

Source aussi
La gratitude inentamée
Devant la vie."

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Le premier pas", qui est vendu au prix de 5 €, contact : Les.passerelles@laposte.net

"De toutes mes farces", d'Éric Dejaeger

 



Publié par "Cactus Inébranlable éditions", dans sa collection "Les p'tits cactus", "De toutes mes farces", d'Éric Dejaeger est un recueil d'aphorismes.
Pour moi qui n'écris plus d'aphorismes depuis... une trentaine d'années (!), l'exercice m'est des plus difficiles, si ce n'est le plus difficile.

Donc, rien que pour cette raison, je salue déjà la publication de "De toutes mes farces" d'Éric Dejaeger, pour qui l'aphorisme est une spécialité, et une spécialité qui fait rire.

Bon, bien sûr, il faut avoir l'esprit large pour apprécier toujours cet humour. Je le dis à l'attention de certains lecteurs un peu coincés, ou qui n'auraient pas un sens de l'humour très développé. Mais pour les autres, c'est l'occasion de bien rigoler .

Quelques exemples :

"Les parents veulent toujours plus de pouvoir dans l'école. Ils ne désirent malheureusement pas enseigner."

"Je souhaite à toutes les femmes polonaises profondément catholiques en âge de procréer et qui sont contre l'IVG de se ramasser des triplés trisomiques dans neuf mois."

"Dans un couple végan, interdiction de bouffer de la chatte. Ils sont donc tous les deux frustrés."

"Qui jette la première bière mérite la potence."

"Ses réflexions me font comme des escarres au cerveau."

"Dans cette affaire d'achat d'énergie, Hiroshima n'a gaz acquis."

Il y a tout de même un domaine dans lequel la plaisanterie est difficile. C'est quand est abordée la question du pouvoir (politique) :

"Il ne faut pas changer ceux qui nous dirigent, il ne faut plus nous laisser diriger."

"Quand l'honnêteté deviendra LA règle en politique, plus personne ne voudra être élu."

"Quand un train déraille, on connaît rapidement le nombre de victimes. Quand un politicien déraille, ça prend plus longtemps et il y a toujours prescription."

Trois fois hélas oui.

Le collage de la première de couverture est de Jean-Paul Verstraeten.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "De toutes mes farces", d'Éric Dejeager, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : https://cactusinebranlableeditions.com/produit/de-toutes-mes-farces/