mercredi 27 juin 2018

"Sans cesse", de Gilles Venier

Publié par les Éditions Tarmac, "Sans cesse", de Gilles Venier, est sous-titré avec justesse "rhapsodie à ciels ouverts". Je précise que ce texte est d'abord paru en partie aux Éditions Encres Vives, animées par Michel Cosem.

Il s'agit d'un livre qui ne se circonscrit pas facilement. En effet, c'est un texte anti-formaliste (quel vilain mot, pourtant beaucoup pratiqué dans la poésie contemporaine), par excellence. Cela se sent à la forme du livre, justement, mais aussi à ce qui s'y dit, forme et fond découlant naturellement l'un de l'autre.

Cette suite de fragments, qui ne sont pas toujours des fragments, mais parfois aussi de solides blocs de textes sans séparations, répartis en plusieurs chapitres, ne semble pas suivre un thème apparent.

Alors de quoi s'agit-il, pour finir ? De notes de voyages, de transcriptions de souvenirs de partout en France et de toutes les époques, de réflexions philosophiques, métaphysiques ? D'un peu tout cela à la fois...

Mais je ne crois pas que le véritable enjeu soit là.

"Sans cesse", de Gilles Venier, m'a rappelé certains textes de la Beat Generation (Kerouac, Ginsberg). Ce qui est montré ici, c'est l'amour de la liberté et de la vie, la beauté des paysages, le désir des corps, bref, le côté solaire des choses...Une poésie de la lucidité également, envers et contre tout.

Le style de "Sans cesse" est riche, résolument lyrique, presque hymnique. Un style pas assez souvent édité aujourd'hui en France, où l'on préfère d'ordinaire la retenue (mais pour quoi en rien faire ?).

Extrait de "Sans cesse", de Gilles Venier :

"Ça s'enfonce loin, non pas depuis la secousse des mots - leurs à-coups - mais sous la lumière et depuis la lumière. Ça se déplace d'ailleurs plus vite qu'eux, et, sans reconnaissance à leur égard, monte aux étages les plus sombres du dire, prend une cambuse et en tapisse les murs de graphes dont l'amorphisme des jambages en disperse les sources.

Ainsi trouble d'abord, abîme chaque fois un peu plus la perspective, heurte le regard lequel peu à peu s'aiguise, glisse sous les contrastes et dépasse les apparences. D'abord la joie - poudreuse -, puis la confusion - un maelstrom de voix - bien sûr. Des paysages, des immeubles, des affiches de rue aux en-têtes colorés ceignent harmonieusement ce lieu indéfini où tout ce qui s'y produit ne semble témoigner que d'une différance, d'un saut à la fois obscur et transparent, à la fois vide et jalonné de repères que rythment les heures claires et volatiles du matin, puis celles de l'après-midi, lourdes et dorées, et les plus graves - presque ennuyeuses - qui lentement précèdent le mystère du nocturne, égrenant l'immobile rythme des ombres, comme le pas d'un cheval au travail à la longe trace le cerne étroit et répété d'un seuil."

L'image de couverture est de Régis Nivelle et la postface de Onuma Nemon.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Sans cesse", de Gilles Venier, qui est vendu au prix de 14 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www.tarmaceditions.com


samedi 16 juin 2018

"Partout ailleurs", de Fabrice Farre


Publié par les Éditions p.i.sage intérieur, "Partout ailleurs", de Fabrice Farre, est un recueil de poèmes en prose.
Cette forme d'écriture est inhabituelle chez cet auteur, qui, les autres fois, pratique le vers libre.

Ce qui ne change pas, toutefois, c'est le fait que ces les textes restent courts. Et cela se justifie, car ils ont déjà assez d'épaisseur et de densité pour ne pas avoir besoin de se répandre sur plusieurs pages.

En même temps, la prose leur donne une épaisseur peut-être plus naturelle que dans les vers libres (consubstantielle à cette forme d'écriture, où seuls les sauts de lignes séparent les mots).

Comme le titre l'indique, il est ici question d'ailleurs, mais pas d'un ailleurs mobile, plutôt d'un ailleurs suspendu dans le temps (à tel point que l'on se demande si l'objet du voyage compte encore : en même temps, ramener un voyage aux seuls déplacements, c'est un peu bête aussi ?)

De plus, dans le choix de ces lieux de séjour, ce qui frappe, c'est leur indétermination, comme si ces lieux, plus que les personnes (parfois, ces dernières semblent l'être aussi), étaient interchangeables. 

En effet, l'enjeu est "ailleurs" (façon de parler !). C'est de montrer le rapport entre ces personnes, y compris lorsque les endroits varient.

Parfois, le voyage n'est pas pour le "je", mais pour celles et ceux qui viennent le voir.

Ainsi, le voyage n'est pas un aller sans retour, c'est parfois aussi un retour sans aller.

Avec toujours, dans l'écriture de Fabrice Farre, cette impression de rêve planant, mais bien éveillé, et surtout réel.

Extrait de "Partout ailleurs", de Fabrice Farre :

"26.      Les promesses de retour se multiplient, jusque tard dans la nuit. Venues du port par le bateau français, elles gravissent les coteaux couverts d'étoupe. Elles glissent dans le bassin rocheux, entrent dans la chambre du mourant. Promettre de revenir un jour est une trahison, une pierre qui retombe."

Et cet autre :

"33.      Au rez-de-chaussée, nous avons des histoires interminables de rues. Au-dessus, nous bavardons, loin des lacets urbains. Plus haut, nous nous résignons à oublier en dormant. Dans nos greniers sanctuarisés butinent les abeilles. Avides d'un miel, entre l'être et l'avoir, nous ne touchons pas au ciel, même après plusieurs essais."

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Partout ailleurs", de Fabrice Farre, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://p-i-sageinterieur.fr/la-maison

jeudi 14 juin 2018

"Coups d'oeil", de Patrick Le Divenah

Publié par les Éditions du Contentieux, "Coups d’œil", de Patrick Le Divenah est un livre de poèmes, divisé en deux parties semblables par la thématique et même par l'écriture, s'agissant de "Coups d’œil" et de "Clins d’œil".

Bien sûr, il est facile de remarquer qu'il y a une sacrée différence entre des coups d’œil et des clins d’œil. Ainsi, la deuxième partie, celle des clins d’œil, est davantage parodique que la première.

Par exemple, on y trouve plus facilement des poèmes en vers réguliers, qui sont déjà une parodie de la poésie classique, celle que l'on apprend à l'école.

Il n'empêche que je vois plus de traits d'union que de différences entre les deux parties de ce même livre.

Cela vient de la thématique surtout. En référence à Raymond Queneau, je dirais facilement que c'est un livre champêtre, où tout se passe par les rues, ou par les champs, même si les textes de Patrick Le Divenah sont plus actuels que ceux de son aîné.

Le style de l'auteur est d'ailleurs très original, à part par rapport à ce que je lis habituellement, ni moderne, ni ancien, ni lyrique, ni expérimental, mais un peu tout ça à la fois.

L'humour est presque toujours présent aussi dans ces textes, même si parfois, on ne sait pas si c'est du lard ou du cochon.

Mais avant tout, l'originalité des textes de Patrick Le Divenah tient au fait qu'ils me semblent être toujours très aérés, comme si les sujets d'extérieur contribuaient à créer cette impression de respirer à l'air libre.

Oui, je sais, c'est un peu étrange, mais par exemple, je n'imagine pas ces poèmes se succéder sans un espacement entre leurs lignes.

Il faut que la forme colle à son sujet. Il y a sans doute également une part de virtuosité dans cette écriture.

Extrait de "Coups d’œil", de Patrick Le Divenah :

"la poupée


yeux palpés

enfoncés

martelés au fond des orbites

cheveux crin de cheval fou

jambes en labyrinthe

la tête lui tourne

l'ogre

a planté son couteau dans le ventre plein

du son

éclaté au rire du vent


le sable emplit ton bras vide

tu flottes en dentelles chiffonnées

une lame

entre les seins


et sur la lande un sorcier

brûle tes jupes de papier"


L'illustration de couverture (et celle des pages intérieures) est également de Patrick Le Divenah.

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Coups d’œil", de Patrick Le Divenah, qui est vendu au prix de 15 €, contact auprès de son éditeur (Robert Roman) : romanrobert60@gmail.com

lundi 11 juin 2018

"La poésie, personne n'en lit", de Marc Guimo



Publié par les Éditions la Boucherie littéraire, dans sa collection "Sur le billot" , "La poésie, personne n'en lit" est le deuxième recueil de Marc Guimo. Et le premier poème de ce livre lui donne son titre. Poème manifeste donc, d'ailleurs, je crois, le plus long du volume.

Le titre est provocateur, certes, mais il se vérifie généralement. N'allez surtout pas croire que le contenu de ce livre soit dépité. Non, pas du tout, je trouve. On dirait plutôt que cette situation serait souhaitable pour l'auteur.

Et en effet, si l'on considère que la poésie perdrait son âme en ayant plus de succès, le péril n'est pas imminent.

Ce qui m'a plu dans "La poésie, personne n'en lit", de Marc Guimo, c'est surtout l'humour dont fait preuve son auteur, le dégagement du ton dans le constat du titre, développé au fil des pages.

Il y a de l'humour, mais ce n'est pas non plus trop gentil. Il y a du nerf dans ces textes. Bref, ça vit. 

Et on lit :

"La poésie c'est une botte de foin dans un champ d'aiguilles" ou : "ton livre c'est un sommier mais où est le matelas ?"

Contre quelques formules de ce genre-là, personnellement, je filerais bien quelques barils de vieille poésie lyrique, aux vertus soporifiques.

Bien sûr - mais c'était déjà le cas dans "Un début de réalité - l'auteur n'oublie pas d'évoquer le monde d'actif dans lequel il vit. Et je lui en sais gré.

Extrait de ce livre, "Quatre-vingts grammes de monde" :

"Ce qui est bien quand tu fais de la poésie, c'est que tu oublies très vite tes dettes et la pression au travail : elles ne s'effacent pas, aucun miracle, mais leur arrogance s'est éteinte. Le géant devenu petit soldat. Sous le talon. Au début tu écris parce que tu n'as pas de quoi te payer un massage ou un psy, puis tu continues comme on déroule la notice d'un remède, pour voir s'éloigner les conditions administratives de ce monde. Avec la poésie, tu ne montes pas dans l'échelle sociale, tu ne descends pas non plus, mais lorsque fatigué des écrans tu plaques devant toi quatre-vingts grammes de papier, une fois, deux fois, dix fois, c'est comme si tu faisais des faux billets. Quoi de plus palpitant que d'inventer sa propre monnaie ? Ta journée, c'est de la matière première, ta nuit c'est ta presse. Bien sûr il faut être patient et enchaîner les cafés, si la nature a mis neuf mois pour t’offrir une origine, il est inutile de courir après le bus, marcher n'est pas ralentir, et le temps que tu perds à écrire n'est pas si paumé."

Si vous souhaitez vous procurer "La poésie, personne n'en lit", de Marc Guimo, dont le prix de vente est de 12 €, rendez-vous sur le site de son éditeur : http://laboucherielitteraire.eklablog.fr/

Ce livre est disponible, sur commande, dans toutes les bonnes librairies de France et de Navarre.

mardi 5 juin 2018

"Necro manigances Dandois saisissantes", de Necromongers et Pascal Dandois


Publié par les Éditions Urtica, ce recueil intitulé "Necro manigances Dandois saisissantes" n'est pas écrit comme les profs voudraient que l'on écrive. Et pourtant, c'est peut-être l'oeuvre d'un prof !..

En effet, laissez ici tomber les cours de lyrisme retenu pour vous embarquer dans la lecture de cet empilement de strophes qui n'a pas peur des adjectifs et des néologismes. Ça va nous changer les idées !

Les textes sont signés Negromongers et les illustrations que je trouve très réussies, Pascal Dandois.

Pour ma part, j'ai préféré le texte de la première partie ("les tentacules de l'esprit") à celui de la seconde partie ("La prière d'une foi meurtrière"), qui est écrit en vers rimés et ressemble plus à une chanson.

Il n'empêche... Cette poésie est loin d'être sombre, même quand elle n'est pas drôle. En tant que lecteur, j'ai l'impression que le gars qui l'écrit rigole tout le temps. Et du coup, cela m'amuse aussi.

C'est de la poésie avec de la science-fiction et qui semble parler du futur, alors qu'elle parle déjà de notre enfermement présent. Malgré tout, ici, l'individu se fond avec plaisir dans un univers virtuel qui le dépasse. À ce titre, "Necro manigances Dandois saisissantes" est une oeuvre qui célèbre le collectif de l'homme, une fois qu'il est devenu complètement indifférencié.

Extrait de "Necro manigances Dandois saisissantes" :

"Et puis enfin, la résurrection des couleuvres céphalopodes.
Le caractère grisant des enveloppes de mots susurrés.
L'aiguille serpentaire du revival de l'ombre des pensées.
L'indice caractériel des pages à trancher dans le vif.
Le Kraken littéraire parsemeur de songes sédentarisés.
L'oubli quasi régulier des attentes à imaginer les leurres.
L'idiome ancré comme un roc sans coquillages à sucer.
L'affront végétalisé des encornures à feuilleter en silence.

On ploie sous l'évidence, sous le soc des jachères comatiques.
Il parait qu'avant les paragraphes parlaient pour dormir.
On nage à l'incertitude, entre les reflets dorés de lignes cajoleuses.
Il apparaît dorénavant qu'un seul instant peut enlacer le sommeil.
Commerce étatique confluent, vers des limbes allégoriques.
Sensations d'un lendemain parfait pour recommencer l'hier.
Le feu des pupilles sous les paupières, résiste à l'éblouisseur.
Carcan sous Prozac élévateur, tarissent d'éloge nos consommateurs.

Mais le pire reste à lire, au creux des contours imagés.
Une histoire qui s'écrit à l'encre de sèche, bleu citron.
Un rêve qui s’étire plus longtemps que le monde..."

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Necro manigances Dandois saisissantes", qui est vendu au prix de 6 €, voici le contact de l'éditeur : urticalitblog@gmail.com

lundi 4 juin 2018

"Gorgonzola", de Laurent Robert


"Gorgonzola", de Laurent Robert, publié par les Éditions "La chasseur abstrait", relate la vie d'Émile Zola, racontée en tankas, cette forme poétique du Japon en 5 vers courts et libres.

J'ai beaucoup aimé la part de mystère que dégage ce livre.

La forme du tanka met de la distanciation et de la retenue avec son sujet. Elle empêche le lyrisme de s'épancher sur un personnage (et son oeuvre) que tout le monde n'est pas obligé d'apprécier.

Même si je n'ai pas forcément tout compris des épisodes de ces tankas, leur mystère, née de la brièveté des poèmes, crée la poésie, et contribue à réactualiser l'histoire d'Émile Zola, avec aussi une vision kaléidoscopique de tout ce qui tourne autour de lui.

Extraits de "Gorgonzola", de Laurent Robert :

"          62

            Les chambres de bonnes
La beauté dans les latrines
             La vaisselle sale
L'insipide nourriture
Des bourgeois bouffeurs de liards


            63

            On cherche un soleil
Une chaude épiphanie
             La consolation
Sur aucune page rien
Fors la bourgeoise tambouille


            64

            Au Bonheur des Dames
Temple des frivolités
             Nymphes et déesses
Enivrées par la réclame
Les rendus le bon marché


             65

             Savante anarchie
Aux régiments des rayons
              Désordre voulu
Des chemises des dentelles
Froufrou continu des robes"

Si vous souhaitez en savoir plus sur "Gorgonzola", de Laurent Robert, qui est vendu au prix de 15 €, rendez-vous sur le site des éditions : http://www.lechasseurabstrait.com/

"La tentation", d'Alain Wexler


Voilà un livre qui est intéressant à plus d'un titre.

"La tentation", d'Alain Wexler, publié par les Éditions Henry, est tout d'abord intéressant pour des raisons, je dirais, externes.

Il apporte la preuve qu'un revuiste (Alain Wexler anime la revue Verso depuis 1977) peut être un bon, voire un très bon poète, et du moins, a le droit d'être reconnu en tant que poète. Et cela, poètes publiés en revues (je suis bien placé pour le savoir), vous l'oubliez régulièrement et vous l'oublierez dès demain, concentrés que vous êtes sur vos propres textes qui ne sont pas plus mauvais, mais pas  non plus meilleurs que ceux de votre revuiste !...

Ensuite, en ayant publié 5 livres en 35 ans, Alain Wexler montre qu'on peut continuer à respirer quand même. À nouveau, prenez en de la graine, poètes pressés d'éditer et à qui l'édition n'apporte pourtant aucune joie durable !
Vous êtes trop nombreux, tous comme vos livres, et personne ne s'en souvient ! Mais vous continuez quand même à espérer quelques chimères...

En tout cas, je me souviendrai de "la tentation", qui, à mes yeux, est, à ce jour de juin 2018, l'un des deux ou trois meilleurs textes de poésie que j'ai lus cette année, ce qui n'est déjà pas une si mince affaire, rien que par rapport aux nombres de chroniques rédigées ici...

Bon, je ne vais pas disserter sur le fait de savoir si les poèmes d'Alain Wexler ressemblent à ceux de Francis Ponge. À mon avis, seuls leurs titres y ressemblent : "La lime", "La guêpe", "Les toits"...

À première vue, le lecteur voit qu'il est question de choses matérielles.

Cependant, certains mots sont beaucoup moins matériels : "Train de nuit", ou encore "La tentation", qui donne son titre au livre et qui pour moi, est une énigme.

Derrière ces titres se cache, en fait, une belle construction lyrique, qui n'est pas qu'une construction.

Ce qui me sidère, c'est qu'en parlant d'une seule chose, à chaque fois, Alain Wexler recrée la totalité d'un monde, dans lequel toutes les choses s'imbriquent. Et les mêmes choses reviennent souvent dans des textes différents. L'escargot, par exemple, qu'il m'a semblé voir ramper dans plusieurs poèmes. L'escargot qui pourrait parfaitement résumer cette poétique du tout.

Ce n'est pas en une seule lecture que vous épuiserez les mystères de "la tentation", d'Alain Wexler. C'est un livre qui vous tient chaud et vous apporte plein d'images à imaginer.

Extrait de "La tentation", d'Alain Wexler, la première strophe de "Train de nuit" :

"Ignoré, le voyageur se replie sur l'essieu.
Qui s'écarte de la nuit ?
Ô double destinée de l'acier
Qui déroules un lit sonore !
Un orchestre de percussions et de vents
Cloue le dormeur dans son lit.
Qui veut être seul ?
L'air du dehors ébouriffe l'insomniaque
Et s'engouffre dans l'accordéon.
L'insomnie lance
Des trains aveuglants à sa rencontre.
Les vents assourdissent les transports.
Les transports couchent le voyageur sur la voie.
Mais les transports raient le verre.
Comme un doigt sur la soie !
Les vents assourdissent les transports.
On efface toutes les gares.
Entre le départ et l'arrivée, l'accordéon s'étire
Et le son meurt dans la dernière gare.
La nuit et son cortège de vents mélancoliques
S'engouffrent dans l'accordéon,
Le voyageur, das un effort surhumain,
Tente d’assourdir le vent
Et ne replie que l'accordéon."

"La tentation" d'Alain Wexler est préfacée par Louis Dubost (son premier éditeur au Dé Bleu). Et l'illustration de couverture est d'Isabelle Clément.

Si vous souhaitez en savoir plus sur ce recueil, qui est vendu au prix de 10 €, rendez-vous sur le site de son éditeur : http://www.editionshenry.com/