mardi 4 décembre 2018

"L'Oiseau invisible du temps", de Murielle Compère-Demarcy


Publié par les Éditions Henry,"L'Oiseau invisible du temps", de Murielle Compère-Demarcy, regroupe en trois parties différentes, des poèmes en vers libres, à quelques exceptions près (de rares poèmes en prose).

Dans ce volume, au-delà de ses différentes parties, se dessine une constance jamais démentie. Il y est toujours question, soit de nature (ou plus largement, du monde extérieur), soit de poésie.

La plupart du temps, je n'aime pas la poésie qui parle d'elle-même, car, outre le fait que ça tourne en rond, cela donne au poème une importance qu'il n'a pas, hélas, dans la réalité. Cessez de vous faire des illusions là-dessus.

Seulement, ici, les choses sont différentes. Observations de la nature en mouvement et observation du poème en train de s'écrire sont si bien mixés que - c'est le cas de le dire - la poésie en devient plus naturelle, et trouve tout simplement son souffle.

Quant à la nature, elle est bien réelle, elle est vécue de l'intérieur par quelqu'un qui s'y connaît, qui a traîné longtemps ses guêtres dans les chemins parfois boueux. Ça sent la Picardie, d'ailleurs. Le lecteur remarquera, tout particulièrement, par la médiation des oiseaux (de l'Oiseau ?), les inflexions de la lumière, et la présence de la terre, gorgée d'eau.

Toujours avec l'aide du monde extérieur, "L'Oiseau invisible du temps" est aussi l'occasion, pour l'auteur, de rendre hommage à quatre auteurs : Jacques Darras, Blaise Cendrars, Antonin Artaud et Pascal Commère, à travers plusieurs poèmes de longueur plus importante, dans lesquels sont cités des fragments de leurs textes.

Même s'il est impossible, ici, de citer un seul de ces textes (trop long), la poésie de Murielle Compère-Demarcy y trouve son meilleur souffle, avec son style syncopé si caractéristique, et ses mots-valise qui nous emportent.

Extrait de "L'oiseau invisible du temps", de Murielle Compère-Demarcy :

"La pluie respire ruisselante
sur l'épiderme du monde
ensoleillé soudain
sous la tonnelle aux lierres d'arc-en-ciel
Soleil flambé sur toile de fond citron vert
sur cet été corrosif comme le dard d'une guêpe
Se lève une armée d'insectes
et la bouche des désirs
enfume le métro
des hyperactifs embués
du funambule anonyme
des talons aiguille désabusés
des jean serrés moulés
de fesses hypertrophiées
Les métamorphoses émiettent
des signaux d'amphibies
de crapauds-buffles en hommes-grenouilles
crapauds chanteurs
chaque respiration
chaque branchie chaque poumon
chaque évent
chaque bronche
chaque caverne
dessine les poumons bleus
d'un océan-
poubelle
continent des Hommes-Déchets
jadis Hommes-Abeilles
Cavité lobule alvéole
Fouillent chacune à son altitude
un souffle tisonné
dans la braise des pulsions
le rêve déterminé d'une autre immersion
spongiaires cnidaires vivants unicellulaires
millénaires
séculaires
embuent le hublot-fée
d'un rêve-univers
rechargé par la fièvre
comme un été respire
comme la pluie inspire
après l'apnée
une descente aux envers"

La vignette de couverture est d'Isabelle Clément.

Si vous souhaitez en savoir sur "L'Oiseau invisible du temps", de Murielle Compère-Demarcy, qui est vendu au prix de 8 €, rendez-vous sur le site de l'éditeur : http://www/editionshenry.com/

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